Asie 2019 - Road trip à moto nord Thaïlande - Partie 2/3 - De Thung Chang à Lampang

25 janvier – Thuang Chang à Nan, par le chemin des écoliers
80 kilomètres pour 1 heure 30 de route ou 225 bornes en 5 heures ? La question ne se pose même pas, allez hop, direction le nord et la route de l’école buissonnière.

Mais avant, il faut se réveiller. 
Tranquillement. 
Profiter de cette pause de calme et de fraîcheur, il fait 15º ce matin, et clamer haut et fort : c’est beau une campagne sans coq !

Nos carcasses réchauffent au soleil levant, devant notre terrasse, un chat hurle sa vie pour une miette de pain. Je lui propose un morceau de biscuit trop sucré, mais il préfère aller quêter sa pitance chez les voisins qui mangent du poisson et du riz.

Nous quittons Marco et son petit havre de tranquillité et attaquons directement avec des travaux majeurs sur la route qui mène vers la frontière avec le Laos. Il y en a pour une quinzaine de kilomètres, mais entrecoupés de grands pans de route terminée et nette comme un tapis de billard.

Ensuite, c’est la montagne avec ses virages par milliers et ses paysages extraordinaires.
Nous évoluons dans un monde ignoré des touristes, loin des circuits classiques, où les locaux nous dévisagent intrigués et souriants.

La route est posée sur une crête, nous évoluons entre deux vallées où de petites silhouettes se meuvent lentement, penchées sur leur labeur quotidien.
Puis le ruban d’asphalte se déroule comme un tapis volant et plonge dans le cœur de la vallée, proche des rizières et des cultures en terrasses. C’est d’une beauté renversante, mais je me garde de trop m’extasier de peur de rater le prochain virage.
Il en va ainsi pendant plus de 100 kilomètres, jusqu‘au moment où nous retrouvons des ouvriers avec leurs énormes machines en train de reconstruire la route.

Le macadam a disparu, il ne reste qu’un revêtement instable de gravier et de latérite, je dois redoubler de prudence. 

Je tente une blague à mon passager en lui rappelant notre premier périple en 2006, sur la route de Pai (en Thaïlande) où des travaux importants avaient lieu, que le pire serait que la route de terre soit mouillée et donc transformée en patinoire.
Au ''oire'' de patinoire, nous tombions sur un camion vomissant des centaines de litres d’eau à la seconde pour recouvrir la poussière. La route est en pente, la moto devint incontrôlable et aujourd'hui encore je remercie mon Saint Patron d’avoir jeté un œil sur nous ce jour-là.

Donc, au moment où je rappelle cette anecdote à André que vois-je devant nous ?
Une route détrempée, de la latérite luisant sous le soleil et une roue avant qui ne demande qu’à se désolidariser du reste de la moto.

Je roule au pas, serre les fesses et tout le reste du corps, ne touche pas au frein avant et titille, aussi délicatement que possible, du bout de la chaussure droite le frein arrière. Au fond de moi je rappelle à Saint-Christophe que nous portons le même prénom et qu’il est temps de faire un tour du côté de la route 1081.

Enfin, nous distinguons le camion qui perd ses eaux et, petit à petit, à la vitesse léthargique d’un escargot ayant fait une escale à la SQDC, nous finissons par rejoindre le mastodonte incontinent.
L’ouvrier arroseur coupe le jet et me fait signe de passer sur le côté. 
Ben non m’sieur, je vais rester sous la douche, j’ai bien du plaisir, me dis-je en me cramponnant au guidon.
Je souris dans mon casque lui crie SAWADI KHAAAAP et peut enfin remonter sur une route tout aussi instable, mais sèche.

Rien de tel que de se sortir d’une route trempée, en pente et perdue au fin fond des montagnes isolées du nord de la Thaïlande à moto pour se sentir vivant !

Les travaux sont terminés, la route encore défoncée, mais au moins il y a du goudron en bonne et due forme dessus, je peux enclencher quelques vitesses et monter au-dessus des 32 km/h de ces très longues dernières minutes.

Et puis le miracle se produit, au bout de 115 kilomètres de route hasardeuse et souvent en travaux, celle-ci devient impeccable. Une double ligne jaune trace le parcours et c’est du concentré de bonheur de conduite. Pour mon passager, c’est un peu moins le fun, il se cramponne aux poignées et tente de prendre autant de plaisir que moi.

Nous nous arrêtons quand même assez souvent pour admirer les collines recouvertes de forêts et assez souvent pour rien du tout. Les paysans pratiquent la culture sur brûlis et par chance nous arrivons après leurs délires pyromanes.
Par contre, ça va mal pour les pans de montagnes pelés qui, faute de fondations solides, se ramassent en amas glaiseux aux premières pluies.

Pause casse-croûte dans un petit resto de bord de route et, ne prenant aucun un risque commandons nos classiques qui ont fait leurs preuves, la salade de papaye verte et une assiette de kao niao. Je me gâterais quand même avec une aile de poulet délicieusement grillée au charbon de bois, et encore une fois, nous ferons le bonheur des locaux qui nous décochent sourire et œil en coin pour voir si nous apprécions. Je lève mon pouce au gargotier pour lui signifier mon contentement ; rassuré, il se concentre sur ses autres clients.

Enfin, après plus de 6 heures de trajet nous arrivons en vue de la petite ville de Nan qui fera une excellente escale après une sacrée journée de conduite.

Petite chambre un brin surévaluée, mais ça nous convient et nous laissons pantalons et bagages avant de découvrir la ville.
Et quoi de mieux que de commencer par le marché ?

market - Nan - Thaïlande
La chance nous sourit, puisqu’à peine arrivée, nous assistons au déballage de la marchandise d’une souriante mamie. Oui, c’est bien ce à quoi, je pensais, une armée de gaspards éventrés sont extraits du sac sous l’œil attentif et gourmand des curieux.

Vite, rendons-nous au rayon fruits et légumes !

Ce marché est vraiment propre et notre présence suscite nombre de commentaires et de roucoulement des vendeuses qui ne doivent pas voir de beaux messieurs comme nous aussi souvent.

market - Nan - Thaïlande
Les gens sont absolument adorables et ne refusent jamais de faire un coucou à la caméra, tout est sourire et gentillesse. Nous achetons quelques raviolis au porc, un sac de morceaux de jacquier et goûtons à des mets offerts par les sympathiques boutiquières.

Sur des feuilles de bananier, je me penche pour voir ce qu’offre ce monsieur pour 50 bahts. Hé bien, oui, ce sont des larves vivantes de fourmis, encore une première… Mais que l’on se rassure, ces mets sont vraiment rares. Tous les Thaïlandais ne sont pas friands de viscères de crapauds, de rats en escabèche ou de tartare de larves de fourmis.

Night market - Nan - Thaïlande
Après une micro sieste de mon copilote, nous partons découvrir le marché de nuit qui se situe à côté de notre hôtel. Nous sommes peut-être six Occidentaux à dominer de notre haute taille les locaux qui fréquentent essentiellement les lieux et encore une fois sommes comme une attraction exotique pour eux.
Tout le monde est vraiment super souriant et gentil, nous propose de goûter avant d’acheter et jamais n’insistent pour nous vendre leurs babioles ou leur nourriture, c’est varié, les odeurs sont terriblement appétissantes et nous avons envie de goûter à tout.

Le poulet entier, cuit dans une immense jarre qui sert de barbecue sera du menu, ainsi qu’une saucisse de Chiang Mai, du riz gluant rouge et des côtes levées sauce tamarin. 

Night market - Nan - Thaïlande
La grand-place est occupée par des centaines de personnes assises sur des nattes autour d’une table basse en bambou.
Nous faisons pareil, mais franchement, n’ayant pas la flexibilité ni l’habitude de manger en faisant du yoga, nous trouverons ça rude pour nos anatomies occidentales sans souplesse.

Juste avant de rentrer, nous pénétrons dans la cour d’un temple où les statues d’un couple trônent. Nous l’avons vu sur tout un tas de souvenirs, t-shirts, sacs et autres accessoires, mais nous ne savons pas ce que c’est.
C’est en entrant dans le temple où une statue de bouddha à quatre visages nous accueille, que nous comprenons. Les murs, comme dans beaucoup de temples en Thaïlande sont peints de fresques diverses. 

The Whisper of Love - Nan - ThaïlandeEn général on y explique le cheminement de Siddharta Gautama, de son état de prince jusqu’à celui d’Éveillé, mais ici en plus il y a des scènes de la vie quotidienne et notamment ce fameux couple, surnommé The Whisper of Love (le murmure des amoureux). Moins romantiques, un peu plus loin, des singes s’adonnent à la chose et des humains se complaisent dans les coquineries que la bonne éducation m’empêche d’évoquer ici.

Le bar voisin de notre chambre arrête sa musique à 22 heures, l’heure pour tout le monde d’aller faire un petit tour du côté de notre ami Morphée.

Jardin du Hug Her Him
26 janvier - Nan à Lampang
Finalement, le futon qui sert de matelas n’a pas été un handicap, la majorité des lits sont de toute façon extrêmement durs, nous en avons pris l’habitude.

Le petit-déjeuner est un buffet avec omelette et curry de poulet, un peu de riz sucré, deux toasts et quelques fruits. Nous sommes prêts pour une belle distance entre les deux villes.
L’autoroute 101 sera notre voie d’accès la plus rapide, mais il y a quand même 230 kilomètres, il va falloir s’accrocher mon p’tit bonhomme !

Autant les Thaïs sont excellents conducteurs en ligne droite, au premier virage il n’y a plus personne, et c’est là que la puissante moto entre en action. D’une petite torsion du poignet, je laisse les crâneurs de la vitesse sur place et enchaîne les courbes avec délectation.

Il faut juste se rappeler que ça ne les dérange pas beaucoup de doubler dans un virage ou dans une côte sans visibilité et être prêt à éviter un véhicule à contresens.

Il nous faudra presque 3 heures pour boucler ce trajet en incluant la pause café/essence/pipi, une autre pour reprendre quelques couleurs, il faut dire qu'André voit moins la route que moi et qu’une série de virages négociés à 100 km/h, ça doit se digérer.

Nous arrivons tranquillement en vue de la ville de Lampang, et trouvons facilement l’hôtel. Notre chambre ne sera pas disponible avant une heure, le temps pour nous d’aller trouver de quoi nous sustenter.
Pas grand-chose dans le coin sinon ce resto de burgers faits maison où l'on offre des gants genre station service pour ne pas s'en mettre plein les doigts. Pourtant, c'est ce qui est meilleur les doigts pleins de sauce !

Wat Phra That Lampang Luang - Lampang- Thaïlande
À 14 heures, la piaule est prête, nous y jetons nos bagages, changeons de tenue et partons tout de suite découvrir l’un des temples les plus renommés de la région, le Wat Phra That Lampang Luang situé à une quinzaine de kilomètres du centre-ville.
Nous passons par des routes un peu perdues, l’avantage du GPS réglé en distance la plus courte est de nous faire découvrir des endroits originaux.

Le temple est majestueux, et hormis un groupe de touristes Français qui se fait rappeler à l’ordre par les pèlerins, car ils portent leurs chaussures, il n’y a pas beaucoup d’Occidentaux ici.

La fondation du temple est estimée entre le XI et le XIIe siècle et on dit que Bouddha serait venu en personne offrir un cheveu.
Bon, là, je fais un rapide calcul, et me demande quel âge avait Bouddha lorsqu’il est venu faire ce don capillaire.
À moins que Bouddha ne soit venu avant la fondation du temple, aie fait le fameux don, et puis un certain nombre d’années plus tard, le temple fut élevé pour honorer ce geste.

Wat Phra That Lampang Luang - Lampang - Thaïlande
Dans un tout petit temple, un drap est suspendu, et par un minuscule interstice, la lumière reflète le chedi et les fidèles qui en font le tour. Ça fonctionne surtout s’il fait grand soleil et qu’un touriste pense à refermer la porte pour replonger la pièce dans le noir. Oui monsieur, c’est à vous que je cause !

Devant l’enceinte du temple, des dizaines de carrioles attendent les visiteurs pour les balader un peu. On ne trouve ça nulle part ailleurs en Thaïlande, mais nous préférons abuser de nos chevaux-vapeur plutôt que d’imposer nos volumineuses présences au petit canasson tout maigrelet.

Nous revenons vers la ville et tentons la visite d’une bâtisse remarquable, mais arrivons 15 minutes avant la fermeture. Nous jetons notre dévolu sur la fête des artisans, qui se déroule justement ce week-end sur les bords de la rivière.
Et c’est aussi dans ce coin que nous retrouvons quelques-unes des fameuses fresques de Lampang.

Street art festival - Lampang - Thaïlande
Nous parcourons les quais, assistons à des concerts donnés par des enfants et des collégiens avec plus ou moins de réussite, mais l’effort est louable.

Puis, après une petite pause fraîcheur et douche à l’hôtel nous venons arpenter la fameuse walking street qui est tout simplement le marché du week-end de Lampang.

Comme à Nan, ici, tout est bon enfant, il y a très peu de touristes occidentaux ou chinois, la majorité des gens sont thaïs et l’ambiance s’en ressent.
Il y a bien moins de monde qu’à Chiang Mai et on s’y sent bien.

Night Market - Lampang - ThaïlandeLes effluves et fumets qui flottent dans l’air donnent de l’appétit, les grillades ou les soupes embaument la brise qui commence à devenir un peu plus fraîche. Nous serions attirés par tout ce qui cuit ou presque, il faut quand même se garder une petite gêne. Les intestins et le cul de poule, merci très peu pour nous, ce soir nous allons faire bombance !

Un resto repéré un peu plus tôt se targue d’offrir des produits de la mer, alors, loin de toute surface d’eau salée, nous faisons confiance au système de transport de nourriture vivante et allons nous attabler.

La serveuse ne comprend pas un mot d’anglais, je ne connais que trois plats en thaï mais il y a les photos sur le menu un peu graisseux.
Des tod man plaa, des crevettes panées à la noix de coco, du curry vert au poisson, des petites coquilles Saint-Jacques à la sauce verte au barbecue, le tout accompagné de riz et arrosé d’une grosse Singha seront au menu.
De plats bien épicés et parfumés, de quoi rassasier deux honnêtes hommes.

La fille semble surprise que nous ayons tout mangé et enfin décoche un petit sourire que sa timidité l’empêchait de vivre pleinement.

Un dernier tour au marché qui commence à plier ses étals, et, grâce au point GPS que j’ai entré dans mon téléphone, nous retrouvons la moto que j’avais stationnée quelque part dans le quartier.


Marché Lampang - Thaïlande

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