Mercredi 22 février – San Pedro de d'Atacama – Du Coyote à la Lune

Hier soir nous avons enfin eu le temps de parler un peu avec notre charmante hôtesse. 
J’avais vu une piscine sur la photo du site, mais force est de constater qu’il n’y a aucune piscine ici. En fait, c’est dans le bâtiment voisin, qu'elle se trouve, ainsi que la salle du petit-déjeuner. Mais la température, tout au long de notre séjour à San Pedro ne sera jamais suffisamment décente pour profiter d’une baignade. 

La chambre est grande et très calme. Éloigné du village, l’hôtel Iquisa est un refuge de tranquillité. Quelques chambres donnent sur une cour intérieure et une petite cuisine est mise à disposition des résidents.  

Debout à 6 heures, notre pick-up est à 6h30 et le petit-déjeuner est fourni lors de l’excursion. Nous sommes les premiers dans le minibus, accueillis chaleureusement par Sophie, une artiste française installée dans un village voisin avec son mari chilien. 
Les autres touristes ramassés, à peu près ceux que nous avons brièvement rencontrés hier soir devant l’église, nous partons en direction de la fameuse Piedra del Coyote pour admirer le soleil se lever de l’autre côté des sommets enneigés des volcans, dont le célèbre Licancabur, protecteur du village, qui nous domine du haut de ses 5 916 mètres. 

En très peu de temps nous quittons la route pour prendre une piste qui nous mène au fameux point de vue, le Mirador de Kari
Pendant que Sophie et le chauffeur préparent le petit-déjeuner, nous nous dégourdissons tranquillement les jambes dans la pénombre que chasse une douce lueur venue de Bolivie. Le ciel est malheureusement voilé, mais la magie opère. 

Nous sommes totalement seuls au monde, il n’y a absolument aucun bruit, et nous évitons même de parler. On se croirait dans une gigantesque cathédrale, l’immensité des lieux impose le respect. 
La terre rouge que l’on imagine identique à celle de la planète Mars est recouverte d’une fine couche de sel. La vue porte aussi loin que l’horizon. 

Très doucement, le soleil laisse apparaître quelques signes de vitalité. Les ombres des montagnes se dessinent sur la plaine. Quelques reliefs apparaissent, des rayons percent les vallées et inondent le désert, l’instant est magique, chaque seconde est unique. 

La fameuse Pierre du Coyote, qui tient son nom du dessin animé qui m'a toujours révulsé pour son injustice totale, (estie que je l'aurais déplumée cette grosse perruche de malheur !) est malheureusement devenue inaccessible. De récentes fissures font craindre qu’elle puisse se détacher de la falaise. Inutile de jouer avec la gravité, on sait d’avance que ça va mal se terminer. 
Pourtant, je n’ai aucun doute qu’un accident aura lieu puisque les interdictions sont régulièrement contournées. 

Ça y est, le jour est levé, il est 7h45 et la table est mise. Et quelle table ! 
Un imposant thermos de maté de coca accompagne une salade d’avocats, du pain, une omelette, différentes confitures et un gros pot de manjar, la confiture de lait chilienne. 
Évidemment, tout le monde s’interroge sur les effets des feuilles de coca. Sophie nous assure que rien ne se passera, il s’agit simplement d’un léger excitant que nous n’allons probablement même pas remarquer. Par contre, il est très utilisé pour combattre les effets de l’altitude, dont le mal de tête. Et puis c’est vraiment très bon, le goût est frais et agréable, je vais en acheter quelques kilos ce soir ! 
Mais pour l'instant, il faut que je me calme avec mes tartines de manjar, je crois que les autres commencent à se douter de quelque chose… 


Nous faisons encore quelques centaines de photos avant de reprendre la route en direction de la Vallée de la MortAbandonnant le minibus, nous poursuivons la balade à pied à travers un canyon. 

Au débouché de l’étroit passage, le spectacle est grandiose. À perte de vue, des pics acérés, du sable, des cailloux et des reliefs de rivières. Sans blague, si nous avions des combinaisons spatiales, je ne serais pas plus étonné. 
D’ailleurs, en raison des conditions extrêmes de ce désert, la NASA y teste certains véhicules spatiaux, comme un rover prévu pour aller faire un petit tour sur Mars d’ici 2020.

Sur la magnifique dune de sable fin, quelques sportifs viennent s’essayer au sandboard. C’est comme le snow, mais quand tu tombes, c’est un peu moins froid et beaucoup plus décapant. 

La balade est vraiment sympathique, le chemin descend doucement entre les falaises, le décor minéral est hypnotisant et le calme olympien. 
À l’arrivée, notre véhicule nous attend pour la suite de la journée, nous partons en direction de la Vallée de la Lune et des Tres Maria


Le gros avantage des excursions proposées par l’agence de Santiago, c’est qu’il fait tout à l’envers. Nous assistons au lever du soleil là où toutes les autres agences viennent pour le coucher, ainsi nous ne rencontrons jamais aucun autre touriste, du moins aucun tourisme de masse. Nous sommes presque toujours seuls sur les sites et c’est très bien comme ça. 

En entrant dans la Vallée de la Lune, il faut acquitter un droit de passage. Ce site est sanctuaire national depuis 1982, et ce sont des amérindiens qui le gère et perçoivent l’obole de 5 000 pesos (10$CA) par personne. 

Nous roulons jusqu’aux trois rochers qui représentent les fameuses trois Marie. De fait, depuis qu’un touriste eut fait chuter l’une des trois roches en 2006, il reste 2 Marie debout et une couchée. 

L’action de l’érosion a formé de nombreuses formes aussi étranges les unes que les autres dont cette drôle de tête de tyrannosaure en train de bâiller à la lune. Ce n’est certainement pas l’eau qui a sculpté quoi que ce soit ici, 10 années peuvent se passer avant qu’une goutte de pluie n’atteigne le sol. Le vent et le sable sont les sculpteurs géniaux et psychédéliques de ces formations remarquables. 

Un peu partout, nous distinguons de nombreux cristaux de sel incrustés dans le sol. Celui-ci a été longtemps exploité et utilisé soit pour la cuisine, soit pour nettoyer le cuivre dont le nord du Chili regorge. Par contre, le sel des salar, ces grands déserts de sel, est totalement impropre à la consommation. En plus du sel, il est farci de métaux toxiques, d’arsenic et autres joyeusetés issus des nombreuses coulées volcaniques de la région. 


Nous rebroussons chemin et nous dirigeons vers la Duna Mayor, la grande dune d’où la vue est à couper le souffle. Une grimpette assez raide nous mène au sommet d’une colline, l’altitude et le taux d’humidité quasi-nul, nous font rapidement tirer la langue. L’avantage, c’est qu’on ne transpire pas. 

Ici aussi, il fut un temps où il était possible de marcher sur la crête de la magnifique dune, mais l’arrivée massive de touristes de plus en plus délinquants a mis un terme à cette aventure. 


Le site Valle de la Luna porte décidément bien son nom. Je ne suis pour ma part jamais allé sur la lune, mais si je devais l’imaginer, ce serait exactement comme ce que je vois en ce moment. Il n’y manque qu’une grosse fusée carreautée rouge et blanc. 

Nous redescendons sur terre et finirons notre journée à travers les canyons de la Quebrada de Cari. Des lits de rivières, depuis longtemps asséchés, serpentent entre des monticules où le sel affleure. Des pics acérés, des lames de rasoir, des aiguilles et des pièges par milliers nous rappellent qu'ici, une chute est totalement déconseillée. Dans le silence total, on entend le craquèlement du sel de cette forêt minérale. Nous sommes sur une autre planète. 
Spock, téléportation ! 


Notre première demie-journée d’excursion est terminée. Il nous reste à découvrir le village, le super resto Las Delicias de Carmen, où on mange délicieusement bien pour un tout petit prix et à entrer dans deux ou trois boutiques d’artisans. 
Évidemment, comme partout, on retrouve tout un tas de souvenirs pour le moins commun, mais ci et là, de véritables artistes ont élus domicile. Les prix sont à la hauteur de leur talent, mais en fouinant un peu, on finira par tomber sur de très belles pièces qui feront honneur à notre étagère souvenirs de voyages

Je profite du passage au marché pour m’enquérir d’un sac de feuilles de coca dont je vais faire une délicieuse infusion en prévision de nos prochaines envolées vers les cieux. 

Aux alentours de 15 heures, le ciel devient menaçant. Au loin dans la Cordillère, les éclairs fendent le ciel, des mini tornades soulèvent le sable du désert et on distingue nettement les trombes d’eau s’échappant des lourds nuages. 
Et tout ce maelström de météo pas contente se dirige directement sur nous. 

Dans le désert le plus aride du monde, il peut aussi pleuvoir !


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