Lundi 1er février – Hsipaw – Des beaux mollets sur les chemins de poussière

Le royaume des sacs en plastique
Ce matin, nous déclinons encore une fois les offres de trekking et profitons du petit-déjeuner gargantuesque offert par l'hôtel. 
Des œufs, des crêpes, des toasts, des fruits, soupe, nouilles et riz, il y en a pour tous les goûts, et de quoi tenir de longues heures. 

Dès que le soleil a chassé la brume matinale, nous partons sur les chemins à bicyclette. 
Houla, ça fait longtemps que je suis pas monté sur un vélo ! Surtout un vélo comme ça… Selle au maximum de sa hauteur, mais genoux dans le menton, pas de vitesse et gros panier devant le guidon qui aide à l'équilibre générale de l'ensemble… 
Mais le dicton dit vrai, une fois appris, jamais oublié.

Nous allons donc nous balader dans les environs de la ville, à travers quelques villages Shan, et avec comme objectif, des sources d'eau chaude.
On ne lâche pas le morceau, des vrais pitbull de la cascade et des geysers. 

Nous visitons le temple des Gardiens de la ville, où se mêlent statues de tigres effrayants, éléphants, Bouddha, et autres divinités. 
Une jeune fille protège son scooter en faisant vrombir le moteur et en émettant des séries de trois coups de klaxon. Peut-être cherche t-elle la protection de son klaxon aussi. 

Chacun ici va prier et déposer des offrandes devant la divinité qui va lui offrir le maximum de protection. L'encens fume un peu partout, les tigres ont des bananes dans la gueule, les chandelles forment des flaques de cire, c'est très paisible et vivant. 

Nous remontons sur nos biclous et continuons notre chemin. Pas bien longtemps, puisque nous tombons sur le fameux jardin de Miss Popcorn
Une vieille dame qui tient un petit café/resto, dans un agréable jardin et qui perd un peu la tête et ses commandes entre les tables. Ses jus sont frais et ses chaises confortables. 
C'est un bel endroit pour passer un peu de temps avant de reprendre la route. 

Nous continuons notre pérégrination, mais juste après madame Maïs Soufflé, un monastère nous ouvre ses portes. En fait, les portes des temples et monastères sont toujours ouvertes à qui veut bien se déchausser et respecter les lieux. 
Nous n'y croisons jamais personne, je me demande bien où sont les 500 000 moines du pays. 

La particularité de ce temple (et du suivant) est d'abriter une très vieille statue de Bouddha en bambou recouverte de feuilles d'or. 
Les lieux sont frais et agréables, le visage serein du saint homme appelle à la méditation, mais nous avons encore un peu de route si nous voulons tremper nos corps meurtris par tant d'efforts dans cette fameuse source. 

Je me fie au plan dessiné à la main, et, à l'école, je décide de prendre à droite, sur ce qui me semble être la route la plus logique. 
La longue route semble ne pas finir. Évidemment, aucun panneau ou signe de piste ne confirme la direction. Nous nous arrêtons demander notre chemin à deux gentes dames qui tiennent commerce et qui, devant nos mines asséchées nous offrent un verre d'eau. 
Nous le buvons par politesse, tout en espérant qu'elles aussi, ont dans l'arrière-boutique une de ces grosses bonbonnes d'eau potable comme on en voit partout. 
Lorsque je demande où se trouvent les sources, elles me font signe de faire demi-tour et de tourner quelque part à droite. Je le savais, il fallait bien aller tout droit il y a 20 minutes…

Nous retournons donc à la fourche et, pour plus de sécurité redemandons aux deux messieurs qui pétunent, tout en crachant rouge dans la poussière. Ils regardent la carte, lisent l'inscription en birman, et me font un signe clair d'aller dans la direction par laquelle je viens juste d'arriver. Évidemment… 
Les prochaines sources d'eau chaude, toutes les prochaines, sortiront du pommeau de la douche de ma salle de bains. 

Je profite de cet arrêt en face d'une école très bruyante, pour aller voir la maîtresse et lui donner une poignée de stylos. Elle est super contente, me remercie infiniment pour mon geste, me serre la main et m'envoie presque des bisous. Les enfants regardent par les fenêtres, me font des gros sourires et des signes de la main. Je crois que je n'aurais pas assez de ce mois en Birmanie pour m'habituer à tant de gentillesse spontanée. 



Nous roulons un peu au hasard des sentiers, croisons des dames qui se lavent dans le joli ruisseau bordé de détritus, faisons des sourires à deux vaches qui pataugent dans la fange et saluons les gamins qui viennent de sortir de l'école. 
Nous repartons en direction de la ville et faisons notre pause journalière au Yuan Yuan. Même avec plein de rhum dans le shake, c'est le même prix. Aubergiste, une autre pina colada ! 

En discutant avec les deux gentilles globe-trotteuses françaises croisées ce matin au petit-déjeuner, nous apprenons que la fabrique de nouilles est juste au bout du chemin de l'auberge. 
Nos cocktails avalés, et un peu feeling, nous reprenons le guidon et allons par-delà la voie toute démantibulée du chemin de fer. 

Tout un tas de nouilles de riz sont en train de sécher sur des supports en bambou au gré de la brise poussiéreuse. Un jeune homme vient chercher quelques bâtons, et nous fait signe de le suivre dans la fabrique. 
Une sacrée organisation artisanale s'offre à nos yeux. 

Dans la pénombre et la vapeur, six personnes se concentrent sur leurs taches respectives. Une dame sépare les nouilles et les passe à sa collègue qui les pèsent rapidement. 
Un jeune homme les prend, forme un tas homogène et le dépose sur une machine à vapeur. Le chanteur du groupe ferme un couvercle recouvert de linge sur le tas de nouilles qui ramollit. Il tape fort dessus avant de les passer sous une presse pour les plier en deux et de les transmettre à son pote qui les plient encore une fois en paquets identiques. 
C'est la doyenne qui ferme ce ballet infernal en attrapant les paquets chauds pour les écraser sous une petite presse et leur donner leur forme définitive. 
Pour terminer, un petit voyou local récupère ces paquets et les empilent sur une bâche un peu poussiéreuse, dans le courant d'air d'un ventilateur pour les faire sécher. Rien d'hygiénique, ni de très sécuritaire, mais ça fonctionne. 
Et, foi de gourmand, ces nouilles sont exquises dans une soupe ou en salade avec des tranches poulet et une bonne sauce à la tomate et piments. 



Nous remercions toutes ces belles personnes, si concentrées sur leur tâche qu'ils ne nous voient même plus et revenons déposer nos vélos à l'hôtel. Je réussis à organiser la suite de notre voyage en réservant deux billets dans un bus qui fait le trajet directement de Hsipaw à Bagan. 

Il part à 19 heures et arrive le lendemain aux alentours de 6 heures. Je pensais qu'il fallait impérativement s'arrêter à Mandalay pour changer de bus, voire y passer la nuit à cause des horaires. Mais non, il y a bien un chauffeur qui va se taper 11 heures de route avec des passagers, pour faire les 375 kilomètres qui nous séparent de Nyaung U. 
Et nous, pendant ce temps-là, on va essayer de dormir... 

En attendant, le soleil quitte le pays. 
La poussière devient complètement visible dans les rayons des phares des rares véhicules qui en possèdent, mais nous irons quand même manger chez ce Chinois assez peu affable, qui fait une excellente cuisine, dont une salade de nouilles Shan au poulet.


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