Dimanche 14 février - Lac Inle – De l'eau et du vin

Au petit-déjeuner, nous parlons quelques minutes avec Jacques et Pascale, un couple de Français fort sympathique, comme quoi , tout espoir n'est pas perdu.
Ils partent eux aussi à Hpa An demain en bus, mais n'ont que le billet jusqu'à Bago. 
Nous leur donnons les indications pour trouver notre agente de voyage qui nous conseillait, comme le patron du Little Inn, de prendre tout de suite le billet suivant, au risque de sécher sur le bord d'une route en pleine nuit. 

C'est l'heure de la messe, mais y a pas d'église, alors nous louons des vélos pour une autre belle journée sur les routes enchanteresses autour du lac Inle. 
En rentrant hier après-midi, nous nous étions promis une petite pause. Les selles sont dures, les vélos vieillissants, et les routes en mauvais état. 
Mais comme je m'étais trompé de direction et que je veux absolument aller voir ce fameux village lacustre, nous en reprendrons pour une deuxième journée, merci. 

La route est vraiment plus agréable. Large, en bon état et sans aucune difficulté, un bonheur de cycliste amateur. Aujourd'hui, c'est moi qui me tape le vélo qui change de vitesse tout seul, ça pourrait être pratique si c'était la bonne, mais non. 
Pas grave, il fait beau, on est jeunes et pleins d'entrain, ça va être une belle journée. Une chaude journée aussi. 

À quelque 8 kilomètres de Nyaung Shwe, nous arrivons au petit village de Maing Thauk, porte d'entrée de son pendant lacustre. 
Un pont en bois de 400 mètres, relie la terre ferme au lac, à partir de là, nulle autre solution que le bateau pour se déplacer. Nous sommes les seuls visages pâles de l'endroit et on nous regarde avec amusement. 

Des bateaux venant de la rive ouest déposent leurs passagers, des paysans rejoignent leurs parcelles ondulantes au gré des vagues, des enfants se promènent entre les maisons. C'est incroyablement paisible. 

Tout au bout du pont, une dame nous demande si nous voulons faire le tour du village sur son sampan. Sans même y réfléchir, je dis oui, bien sûr, lui paye ses 4 000 k et nous embarquons sur son navire. 
Enfin, nous embarquons… Enfin, pas vraiment, je me roule gauchement dans la barcasse. Je me fous de savoir si quelqu'un me regarde.
Ce bout de bois flottant n'a qu'un objectif dans sa vie de bateau, nous faire tomber à l'eau. 
Sérieux, je suis à l'aise sur un pédalo, une paire de skis, un kayak, ou n'importe quoi en hauteur et/ou sur l'eau, mais là, c'est différent. 
D'abord, je n'ai aucun contrôle de ce qui se passe dans mon dos. Ensuite, j'ai des appareils photos et puis, l'eau est frette… 

Je ne suis pas très confortable en montant sur ce tout minuscule rikiki bateau, mais rapidement, je fais confiance à notre jolie batelière, qui connaît parfaitement son métier. 

Elle nous promène à travers les rues et ruelles du village où elle est née, nous fait découvrir l'arrière cour de ces maisons et la vie qui s'y déroule dans le calme des eaux du lac. 

Des enfants marchent sur les parcelles flottantes de verdure. Armés de longs tridents en bambou, ils traquent le poisson imprudent. 

Des hommes tranchent des troncs d'arbre dans une scierie, en vue d'une nouvelle construction, des femmes font la lessive de la semaine, une grand-mère porte son petit-fils et, devant nous, arrive une jolie petite fille jupée de rose et élégamment penchée sur sa rame trop grande pour elle. 

Viennent ensuite des garçons qui manient leur longue godille de la manière la plus traditionnelle qui soit. La jambe est enroulée autour du manche, une main sur le dessus, et, d'un geste on ne peut plus élégant, ils déplacent leurs embarcations en troublant à peine le reflet sombre des canaux. 

Les maisons sont bien plus grosses que ce à quoi je m'attendais. Je pensais ne voir que quelques huttes en bambou, recouvertes de chaumes, mais il y a ici de très grandes maisons en teck avec deux étages. 

Dans le prolongement du grand canal, où flottent des jacinthes d'eau, les montagnes donnent une perspective grandiose. Je ne regrette pas d'avoir remis mon corps meurtri sur une selle, cette promenade vaut vraiment le coup. 

Notre gondolière nous demande si nous voulons manger, et nous dépose au pied de l'escalier du seul restaurant de l'endroit. Il reste une table libre, avec une vue imprenable sur le long pont où commencent à affluer des dizaines de visiteurs. 

C'est comme une marée humaine de jeunes couples, et là, je me rappelle que c'est la Saint-Valentin… Ça ne me concerne pas vraiment, j'ai 365 St Valentin par année, mais celle-ci est assez originale.
Tous les jeunes couples, habillés à l'occidentale, portent le même t-shirt ou la même chemise. Le jeune homme et la jeune fille sont habillés pareils ! 

C'est vraiment drôle de voir ces allures modernes aux cheveux sculptés, aux pantalons moulants, mais avec des t-shirts identiques. 
Des souris qui se font des bisous, des tricots rayés, des carreautés, des chemises à pois, des éléphants qui font des cœurs avec leurs trompes, il y en a pour tous les goûts. 

Le petit balcon avec vue s'est rempli en seulement quelques coups de pagaie. Notre batelière, qui travaille aussi au restaurant, se charge de transborder tous ces gens, par delà le grand canal. Il n'y a plus de place, mais c'est mal connaître la débrouille asiatique. 

Après notre repas, il est temps de faire un petit bout de chemin, nous traversons une dernière fois le canal avant de retrouver nos vélos dans l'immense embrouillamini de véhicules à deux-roues qui s'est créé depuis notre arrivée. 

Sur le chemin du retour vers Nyaung Shwe, il est une visite qui change de l'ordinaire. 
Red Mountain Estate, est un vignoble conçu conjointement par un Français et un Australien. Il est installé sur les flancs d'une montagne pour profiter pleinement du micro-climat qui règne ici. 

Le point de vue est imprenable, mais se mérite. Nous devons descendre de nos selles, la montée est devenue trop raide pour nos pauvres vélos et nos cuisses sont tétanisées. 
La récompense se traduit par une dégustation (3 000 K) de quatre vins, 3 blancs et 1 rouge. 

Il doit faire 70º à l'ombre, et la serveuse est vêtue d'un manteau rose en tissu épais surmonté d'un col de fausse fourrure...

Nous commençons par un verre de sauvignon, un blanc très sec, et très vert. Il pince un peu, et les papilles sont passablement énervées de ce traitement acide. Il est rapidement suivi par un muscat plus fruité et sec qui ravit le palais, d'un Syrah caillouteux et relativement léger, et finissons par un muscat vendange tardive très savoureux. 

Je ne sais pas si c'est le manque de polyphénols dans mon organisme, mais, sans être des grands crus, on se rappelle qu'on est en Asie, cette petite dégustation n'est vraiment pas désagréable. 

Allez hop, il faut remonter sur nos volés, vélos, ajuster le pelle, heu la selle et essayer de pas se vautrer dans cette montée vertinigeuse qui bizarrement est devenue une descente à putes, abrupte. Hips
 Le retour se fera en hurlant à tue-tête, de joyeuses chansons de corps de garde. 

Nous rendons nos instruments de torture à la dame de la location, qui s'étonne toujours de nous voir revenir si tôt, et prenons quelque repos en attendant le crépuscule. 

Comme d'habitude, nous ferons honneur au délicieux rhum sour sur la terrasse de l'Ancestors
Le jeune serveur, qui ne parle pas très bien anglais, commence à nous connaître et nous approvisionne régulièrement en bols de grignotines à chaque fois qu'ils se vident.

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