Samedi 30 janvier – de Mandalay à Hsipaw - Le bus, c'est exotique !

4h15, oui, du matin. 
Le réveil me tire d'un rêve délicieux, mais quitter Mandalay pour Hsipaw se mérite. 

Comme prévu, nous sommes à la réception à 4h45 pour prendre notre taxi vers la station des bus. Notre chauffeur dort encore, mais finira de se réveiller en conduisant. Finalement, il ne nous emmène pas à la station des bus, mais au bureau de la compagnie, qui est encore fermée. 
Aucune inquiétude de la part de notre chauffeur, il n'est que 5 heures et nous partons à 6. 
 À 5h15, je lui demande quand même de passer un petit coup de fil pour savoir si c'est bien ici qu'il faut attendre. 
Il ne voit pas de numéro de téléphone, fouille sur mon ticket et me montre le numéro à appeler. Je n'ai pas de téléphone, puisque le Samsung acheté à Chiang Mai ne fonctionne pas, et de toute façon c'est écrit en birman… 
Lui, il a oublié ses lunettes et n'y voit rien. Une chance qu'il dormait encore en conduisant. Je lui prête les miennes, mais ça ne l'aide pas, et il arrête une dame dans la rue. 
Enfin, il réveille quelqu'un qui lui dit que le transfert ne devrait pas tarder, et de ne pas nous inquiéter. 
Il me fait un grand sourire, me serre la main, me souhaite bonne chance et repart vers ses draps encore chauds. 

Nous attendons encore quelques minutes avant de voir s'ouvrir la grille. Pas plus de réponses à nos regards interrogateurs de la part du jeune homme endormi, mais, à ce moment là, un gros camion arrive. 
Deux jeunes gaillards chargent des tas de paquets que l'on imagine très lourds dans le bahut. Au bout de 10 minutes, ils nous font signe de monter à côté de la cargaison, c'était donc ça notre transfert. 

Assis sur des bancs en bois, en face de gros sacs de glutamate monosodique, nous affrontons le vent frais du petit matin, avant d'arriver à la minuscule station de bus de la compagnie. On nous fait signe de patienter quelques minutes, puis un employé charge nos sacs dans la soute et nous fait entrer à l'abri de la cabine. 

Nous avons les sièges A1 et A2, juste derrière le chauffeur. La place idéale pour voir tout ce qui va se passer sur la route. Chouette ! 
À six heures pétantes, le bus chargé de 8 passagers dont deux Canadiens, prend la route en direction du nord. Le copilote insère un DVD dans le lecteur, et nous avons droit à une vidéo qui tourne en bouche, sur les temples majeurs du pays. C'est très mal filmé, il y a autant de neige sur l'écran que dans le pare-brise d'un chauffeur de truck de la Baie James, et les prières bouddhistes agrémentent ce magnifique petit film promotionnel. 

Frustré d'avoir quitté mon rêve, j'installe mes écouteurs, m’enfouis sous ma capuche et cherche à retrouver ce que j'ai quitté il y a si peu de temps. Je m'endors pendant les deux heures les plus intenses du voyage parait-il. Dire que j'ai raté ça. 
Finalement, je retrouve mes esprits un peu avant le premier arrêt. Une cantine sert des plats chauds, mais j'ai oublié mon argent dans le bus fermé à clé. Nous en seront quittes pour attendre dans le froid et le ventre vide. 

Pendant ce temps, à grands coups de jet d'eau glaciale, les chauffeurs arrosent leurs freins qui fument et sifflent comme des cocottes sous pression, la vapeur enveloppe les camions et autobus. 
Après une demie-heure, nous reprenons la route. 

Dans un col, toute une file de camion attend. Nous ne pouvons pas nous croiser, alors deux policiers y vont à coups de sifflets et de radio, pour organiser la circulation. C'est raide, les chauffeurs sont prudents au risque de trouver un raccourci fatal.
Je trouvais notre chauffeur pas mal fancy d'avoir amené son shake rouge cerise. Tiens, ce gars-là est prévoyant et plutôt grano, ça change des chauffeurs dopés au Red Bull, au M150 ou autre boisson énergisante. 
Il s'est préparé un shake au nom poétique du genre Wake up Sweet Driver, ou Happy Morning, Welcome to the sun, un truc du genre… 

Mais force est de constater que la petite bouteille se remplit plus vite qu’elle ne se vide, et ceci, à chaque fois qu'il se met un paquet de feuilles en bouche. Bon, la bouteille est remplie de crachats, c'est le summum du dégueu. 
Mais si ça le tient en éveil et concentré, qu'il la remplisse sa canisse ! J'éviterais simplement de regarder sans arrêt ce qu'il fait avec. 

La voisine d'André fait exactement la même chose, mais n'ayant pas encore vidée sa bouteille d'eau, elle utilise le petit sac noir à vomito. Une chance que je ne suis pas sensible dans les transports, sinon je lui aurais rempli moi son sac à gerbe ! 

Nous ferons une autre petite pause pipi (et vomi pour quelques dames) avant d'arriver à Hsipaw en à peine 5 heures 30. 
Finalement, la conduite de ce pays, comme dans beaucoup d'autres où le code de la route est une invention démoniaque, fonctionne avec ses propres règles. 
Le clignotant ne veut pas nécessairement dire qu'on va changer de direction, le klaxon ne veut pas non plus dire quelque chose de précis, c'est un avertissement pour doubler, se faire doubler, s'arrêter, prévenir qu'on arrive ou faire peur aux chiens couchés trop proche de la chaussée. 

Par contre, je suis très content que le copilote soit devenu la norme, c'est une chouette avancée pour la sécurité routière. 

Dès notre arrivée dans le bourg, nous apprécions le calme relatif qui y règne. Nous sommes attendus par deux jeunes gens qui prennent nos sacs et nous font monter dans le véhicule qui va nous emmener chez Mr. Charles, notre guesthouse. 

Enfin, nous voilà à bon port. Le fameux Royaume Shan, pays des gens de montagnes, rudes paysans et fiers guerriers. 
Originaires du sud de la Chine, ils fondèrent le royaume en 94 avant J.-C., et eurent beaucoup d'influence sur le pays. Persécutés par la junte militaire, contre laquelle ils s'opposèrent, ils résistèrent avec une armée de 10 000 hommes. 
C'est aussi l'état le plus grand du pays. Voilà pour la toute petite histoire… 

L'accueil est chaleureux, le chic hôtel n'est pas pour nous, nous serons logés juste à coté, à la guesthouse. 

Nous profiterons de notre arrivée quasi-matinale pour visiter le bourg. 

Le marché est authentique, les taches rouges décorent les trottoirs et les rues poussiéreuses, les sourires sont toujours très présents et les gens, généreux de mingalabar (le bonjour local) et de signes de main. 

Un essaim rose de jolies petites nonnes coiffées de leurs chapeaux coniques, parcoure les ruelles à la quête de nourriture.

Le soir, fatigués et encore étourdis de tous ces virages, nous ferons une tentative de découverte du Hsipaw nocturne. 

C'est très nocturne, aucune lumière ne vient percer les ténèbres envahies de poussière soulevée par les véhicules. 
Il est dangereux de se promener sur le bord du chemin habillé tout en noir, nous ferons rapidement demi-tour pour rentrer à l'hôtel et mangerons sur place.

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