Lanzarote - 20 au 26 janvier

ÎLE DE LANZAROTE

Première étape de notre parcours canarien : cinq jours à explorer cette île incroyable.

Une île de tant de millions d’années que ses volcans se sont lentement érodés, feignant désormais de dormir à jamais.

L’île de César Manrique, génial artiste et enfant du pays, revenu sublimer ce territoire hostile et pourtant si riche.

Une terre de contrastes saisissants entre le noir des roches volcaniques, le bleu du ciel et de l’océan, et le vert des cactus.

Lanzarote, paradis des surfeurs, des cyclistes, des randonneurs et de tous ceux qui aspirent au calme, loin des centres de villégiature et du surtourisme.

En route pour cinq jours de découvertes !
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Lundi 20 janvier – De Marseille à Muñique 

Il est presque trois heures du matin, et après une nuit courte et agitée, il est temps de commencer une longue journée. Une douche rapide, sacs sur le dos, nous affrontons le froid et la petite pluie qui tombe sur la zone aéroportuaire de Marseille. 

En moins de dix minutes de marche, nous atteignons le grand hall du terminal 1, baigné de chaleur et occupé par des passagers endormis, étalés un peu partout. Le vol est prévu à six heures, mais, visiblement, le personnel d'Iberia n'est pas pressé d'ouvrir les comptoirs d'enregistrement. 

Enfin, vers cinq heures, nos bagages glissent sur le tapis roulant et disparaissent dans les entrailles de l’aérogare. Nous franchissons rapidement les contrôles douaniers. Il pleut toujours sur la Provence. Le ciel est gris, bas et lourd, mais il fait encore nuit. 

Notre destination ensoleillée nous attend. Je n'aurai pas la chance de vivre l'excitation du décollage : je me réveille seulement vingt minutes avant notre atterrissage à Madrid, où nous devons prendre une correspondance. 

Aéroport Adolfo-Suárez de Madrid-Barajas - Terminal 4

Nous récupérons nos bagages et empruntons la navette vers le terminal 1, d'où nous repartirons. Tout se déroule rapidement : le bus démarre juste après notre arrivée et file sur l'autoroute, sous une pluie battante et un maigre 4°C qui fige la capitale espagnole. 

Les comptoirs de RyanAir sont en pleine effervescence. Des voyageurs partent dans toutes les directions : certains, habillés de manière improbable, s'envolent vers un festival à Munich ; d'autres prennent la direction des îles grecques. Nous, nous embarquons pour Lanzarote, l'arrière-grand-maman des îles Canaries. 

L'avion est tout petit, et personne n'est assis là où il l'aurait souhaité. RyanAir fait payer la sélection des places, et pour ceux qui ne veulent pas payer un supplément, l'attribution se veut prétendument aléatoire. 

Aléatoire, vraiment ? Tout semble fait pour séparer les voyageurs et les inciter à payer pour rester ensemble. 

André se retrouve une rangée à gauche devant moi, coincé entre un Asiatique impatient et une dame bougonne. Devant, en diagonale, un jeune homme passera son vol à baver son stress dans un sac en plastique et ne bougera jamais de son siège. 

Mon voisin côté hublot est discret et tranquille, mais côté allée, c'est une autre histoire. 

Une dame très corpulente s'écrase sur le siège à l'amorti inexistant. Celui-ci gémit et craque ; elle en fait autant, tout en me prenant à témoin de sa misère. Hélas, madame, mon espagnol est aussi fragile que ce pauvre fauteuil, et, même avec un miracle linguistique, je n'aurais pas eu envie de discuter avec vous. 
Le tarmac de Lanzarote est à trois heures de celui de Madrid. Pendant 180 minutes, cette pauvre dame souffle bruyamment à chaque mouvement, invoque tous les Saints du Paradis à coups de "Madre de Dios", et s'agite sans relâche. 

Refusant de mettre son sac dans le compartiment au-dessus de sa tête, elle l’a calé entre ses jambes, ce qui entraîne un "woman spreading" intense, ponctué de coups de pied nerveux sur la moquette fatiguée. Elle complète cette scène sonore en mastiquant du chewing-gum, qu’elle fait éclater à intervalles réguliers, et en dévorant quelques barres Snickers, un sac de chips et un Coca englouti d’une traite.

Heureusement, Morphée vient à mon secours. Je dors presque deux heures, bercé par son étreinte apaisante, tandis que la dame continue son concert de soupirs. 

Il est presque 15 heures lorsque l'avion
 se pose dans un éclat lumineux. Le soleil, impatient de nous revoir, inonde Lanzarote de lumière. Je suis tout aussi pressé de quitter ce tube de métal volant. Nos bagages rapidement récupérés, nous montons dans la voiture réservée à l'avance, qui nous attend. 

Nous voilà en route vers Muñique, un petit village proche de Teguise, où nous avons réservé une chambre. Loin des grands centres touristiques envahi par des myriades de visiteurs, nous profitons du calme et de l'accueil chaleureux de Joy, un surfeur originaire de Malaga. Ses cheveux longs, décolorés par le soleil et le sel, racontent ses nombreuses heures passées à dompter les vagues fraîches et bouillonnantes de cette île minérale. 

Découverte de Teguise, l'ancienne capitale de l'île, très paisible en ce lundi après-midi. L'église, supposée être un incontournable, s'avère bien moins impressionnante que la plus petite chapelle andalouse. 

Mais que ce petit village est charmant ! Ses maisons blanchies à la chaux brillent d'un éclat immaculé sous le soleil de fin d'après-midi. Le centre piétonnier est calme, presque désert, seulement parcouru par quelques touristes. Le vent, d'habitude célèbre sur l'île, n'est qu'une brise légère, juste assez pour agiter quelques brins d'herbe. 

Un magasin propose des produits de soins à base d'aloe vera, l'une des cultures phares de cette terre volcanique. À l'entrée, un bol rempli de morceaux de cette plante miraculeuse invite nos mains curieuses à en tester la pulpe visqueuse. Après l'étrange sensation de manipuler une méduse, toute cette muqueuse est rapidement absorbée par nos peaux avides d'hydratation. 

Nous repartons ensuite vers notre logement, après quelques achats dans une petite épicerie où aucun prix n'est affiché, ajoutant une pointe d'incertitude à notre expérience. Une sieste réparatrice plus tard, nous partons en quête d'un restaurant. 

À deux minutes de voiture, le restaurant El Tenique nous accueille avec ses nappes en tissu et une carte variée. Le service est chaleureux, et les plats, à base de produits locaux, sont un régal. Poissons frais, légumes de l'île et un vin blanc sec accompagnent à merveille cette première soirée sur Lanzarote. Repu et ravi, nous regagnons notre chambre, où la sérénité du lieu nous enveloppe. 

Les étoiles scintillent dans le ciel clair, et un calme absolu règne. Cette première journée, bien que longue, marque le début d'un séjour prometteur, entre découvertes, repos et émerveillement.

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Mardi 21 janvier – Manrique, des entrailles de la terre au sommet du volcan

Ce matin, pas le temps de paresser. Hier soir, j’ai réservé une visite à 10 heures, alors hop, une tranche de pain au fromage, et re-hop, un bol de thé.
Direction le nord-est de l’île, où nous allons nous enfoncer dans les entrailles de la terre.

Soudain, une alarme résonne dans la voiture : la pression des pneus semble être une urgence absolue.
Boooon, ça ressemble au début de notre voyage portugais
Je m’arrête sur le bas-côté et tape frénétiquement sur les quatre roues, qui paraissent encore capables de supporter la carcasse de notre petite Ford Escort. On vérifiera la pression plus tard, le temps nous est compté.

Juste avant 10 heures, nous arrivons sur le parking du site de La Cueva de los Verdes et sommes accueillis avec un grand sourire par une préposée aux visiteurs.
Nous rejoignons le groupe et suivons notre guide vers les tréfonds de l’île.

Cette grotte est un vestige d’une ancienne coulée de lave du volcan de la Corona, aux dimensions exceptionnelles. À 45 mètres sous la surface, nous empruntons le chemin qu’a suivi la lave il y a environ 4 000 ans. D’une longueur de 6 kilomètres, nous en visitons la partie haute, qui elle-même se scinde en deux tubes.
La grotte s’est formée à la suite d’une éruption. La lave, très liquide, a naturellement coulé dans un canyon en direction de l’océan.
En surface, au contact de l’air et de l’eau, elle a refroidi rapidement, tandis que le magma en fusion continuait de s’écouler en dessous, jusqu’à l’épuisement du flot incandescent.
Au fil des millénaires, des blocs se sont détachés du plafond, donnant naissance à une salle de 50 mètres de hauteur où la roche volcanique décline des teintes allant du rouge au vert.

Un auditorium de 300 places, à l’acoustique exceptionnelle, permet d’accueillir un public mélomane exigeant.

Une dernière surprise nous attend lorsque le guide nous intime de ne surtout pas franchir la limite d’un gouffre qu’aucune barrière ne protège.

Le vide est sidérant, l’impression de plonger au cœur de la Terre vertigineuse. Dans un silence absolu, le guide ramasse un caillou et le lance en direction du gouffre.
Après une trajectoire parabolique parfaite, le caillou disparaît dans une mare et produit un simple plouf.

Ce précipice insondable n’était en réalité que le reflet du plafond du tunnel. L’illusion est totale, mais si vous me lisez, la surprise est un peu gachée...

Après presque une heure de visite ponctuée de nombreux Aouch, ma tête !, nous retrouvons le soleil et nous dirigeons vers la prochaine étape : la partie inférieure du même tunnel, les Jameos del Agua.

Avoir acheté nos billets en ligne nous permet de doubler la file de touristes en goguette, fraîchement débarqués de leurs autobus, les pieds décorés de gougounes/chaussettes.

Un escalier nous mène au cœur de la coulée, où un bar propose d’excellents cafés.

Nous longeons un lac souterrain où prolifèrent de minuscules crabes albinos, aveugles et endémiques qui agitent leurs petites pattes en quête de nourriture microscopique.
Il est évidemment interdit d’y jeter quoi que ce soit, que ce soit de la nourriture ou des pièces pour les plus superstitieux.

En remontant à la surface, nous pénétrons dans l’espace aménagé par l’artiste César Manrique.

Un improbable lagon, d’un bleu céruléen éclatant, surmonté d’un majestueux palmier, nous éblouit par sa blancheur.
Les formes sont organiques, il n’y a aucun angle droit, et le contraste avec la brutalité du paysage volcanique environnant est saisissant. Ici, tout n’est que calme, douceur et volutes.



Le célèbre artiste César Manrique est un enfant de Lanzarote, où il voit le jour en 1919. Il étudie l’art à Tenerife, puis à Madrid. 
Fortement inspiré par Picasso et Matisse, il expose ses œuvres en 1954, d’abord dans la capitale espagnole, puis dix ans plus tard aux États-Unis.

Mais Lanzarote lui colle à la peau et, en 1966, il revient définitivement sur son île, qu’il considère comme le plus bel endroit sur Terre, pour y laisser exploser son génie.

Il convainc les habitants de renouer avec le style local : murs blanchis à la chaux, volets bleus ou verts selon l’emplacement géographique, interdiction des panneaux publicitaires, contrôle du développement touristique, interdiction des immeubles hauts, etc.

Précurseur du tourisme durable, il a permis à toute l’île d’en profiter, même si, depuis, le tourisme a explosé et que de trop nombreux hôtels ont poussé sur la côte sud. Pourtant, on ne voit toujours pas de bâtiments qui ne respectent pas le style local.

On retrouve partout des œuvres de l’artiste : des mobiles poétiquement animés par les vents, des sculptures au style original, mais aussi dans la mentalité des habitants, qui vénèrent encore aujourd’hui son héritage.

Il décède tragiquement dans un accident de voiture en 1992, à l’âge de 73 ans, à Tahiche, à tout juste quelques pas de sa maison.

Nous quittons ces lieux empreints de poésie, malgré l’invraisemblable quantité d’influenceuses de bac à sable qui font la moue devant l’objectif de leurs copains blasés.

Direction Punta Mujeres, un tout petit village sans intérêt pour le tourisme de masse et donc totalement ignoré des hordes d’autobus.

Ce village est charmant ! 
Des piscines naturelles ou légèrement aménagées permettent de faire quelques longueurs sans devoir affronter les fureurs de l’océan. Mais avec une eau à 18 °C, la baignade n’est pas des plus tentantes ; laissons cela aux téméraires et aux surfeurs protégés par leurs armures en néoprène.

Repus d’un bocadillo économique et rapide, nous reprenons la route en direction de Guatiza et de son fameux Jardin de Cactus, la dernière création du génial Manrique.

Ahhh, mais que ces poupées trop maquillées à la moue boudeuse m’énervent ! J’ai juste envie de les pousser dans ce magnifique bouquet de branches aux épines acérées.

En tout cas, nous profitons de ce jardin extraordinaire où quelque 4 500 succulentes et cactées bénéficient d’un emplacement idéal. 
Surmontée d’un ancien moulin à mil, l’immense excavation était autrefois une décharge au milieu de plantations de figuiers de Barbarie, sur lesquels étaient élevées des cochenilles.

Il aura fallu une vingtaine d’années pour que ce jardin atteigne son apogée et transporte le visiteur — pour peu qu’il soit un tant soit peu curieux — à travers les cinq continents, ensorcelé par la poésie du lieu.

Après une heure de déambulation contemplative, nous tournons le dos aux coussins de belle-mère et autres euphorbes pour nous diriger vers le Mirador del Río.

Et tenez-vous bien, c’est encore le prolifique César qui a conçu cet incroyable édifice !

Perché à 475 mètres au-dessus des vagues, au sommet des falaises de Famara, il offre un point de vue spectaculaire sur l’île de La Graciosa.

La verticalité est enivrante, et le sentiment d’être un oiseau se confirme lorsqu’on se penche un peu par-dessus la rambarde de sécurité.
L’intérieur du mirador est à l’image des autres créations de Manrique : tout en courbes et en douceur.

Après avoir fait le plein de sensations, nous quittons le site et apercevons que des gens se baladent dessus ! Ciel, nous avons dû manquer quelque chose.

Nous retournons voir le gentil monsieur à l’accueil et plaidons pour une entrée gratuite en lui expliquant notre déconvenue. Il nous laisse entrer avec un grand sourire et nous explique comment monter au sommet de la construction.
Bon, ce n’est pas beaucoup plus impressionnant, mais au moins, on l’aura fait.

Après avoir fait le plein de sensations, nous quittons le site et nous dirigeons vers le Mirador de El Risco de Famara, un point de vue sauvage et gratuit.

Ici, pas de construction sophistiquée ni d’architecture étudiée : juste une falaise abrupte, plongeant dans l’océan, battue par les vents.
Tout en bas, les vagues s’écrasent avec fracas sur le sable noir des plages désertes.

Le panorama est saisissant, mais il est malheureusement gâché par l’attitude irrespectueuse de certains visiteurs, qui sortent des sentiers balisés et piétinent les rares plantes ayant eu le courage de pousser sur ces terres arides.

Nous reprenons la route et, au détour d’un virage, tombons par hasard sur un paysage étrange. Des formations rocheuses fantomatiques se découpent sur le ciel embrasé par le soleil déclinant. Intrigués, nous faisons halte.

Nous sommes à Antigua Rofera, également surnommée la Ville Pétrifiée, une ancienne carrière de pierre ponce abandonnée.
Le vent et l’érosion ont sculpté d’étonnantes silhouettes dans la roche tendre.

Notre imagination fait le reste : ici, un griffon majestueux ; là, une horde de loups figés dans leur course ; plus loin, des visages aux expressions énigmatiques.
Le lieu dégage une atmosphère irréelle, presque mystique.

Alors que le soleil disparaît à l’horizon, projetant sur les reliefs des ombres mouvantes, nous restons un moment à contempler ce décor hors du temps, avant de reprendre la route vers notre hébergement.

Une journée bien remplie, entre merveilles naturelles, art visionnaire et paysages lunaires.

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Mercredi 22 janvier – De Manrique au grand désert volcanique de Timanfaya

Vous vous souvenez de notre expédition dans le désert d’Atacama en 2017, le désert le plus aride du monde, et où, tous les soirs, il tombait des trombes d’eau ?
Eh bien, à Lanzarote, où il fait soleil 380 jours par an, nous avons eu droit au même scénario aujourd’hui !

Heureusement, les immenses nuages noirs ont eu la délicatesse de se vider pendant notre repas face à l’océan, lors de nos trajets en voiture, ou, comme maintenant, en cette fin de journée, alors que je suis confortablement glissé sous ma couette à massacrer ce pauvre clavier.
Un peu d’eau ne fera pas de mal à ces terres arides, après tout.

Nous avons commencé par visiter la Fondation César Manrique, un véritable chef-d’œuvre de maison au cœur d’un champ de lave.
Si nous le pouvions, nous y poserions nos valises et notre retraite immédiatement.

L’histoire de sa création est faite de hasard et de chance.
En 1968, à son retour de New-York, Manrique cherche un endroit où s’installer et, en visitant la région, découvre un figuier émergeant d’une cavité dans un champ de lave datant des éruptions de 1730 à 1736, où rien ne semblait vouloir survivre.

Les propriétaires de cette lande morte refusent de lui vendre, estimant que ce serait du vol de monnayer une terre aussi inutile. Donc, ils lui donnent, et même lui intiment de prendre absolument tout ce qu’il veut comme surface : il y construira une maison de 3000 m² sur un terrain de 3 hectares.

La partie émergée est une habitation reprenant les codes des habitats traditionnels de l’île. Il commence donc à aménager cet espace et, en creusant un peu, découvre par hasard cinq immenses bulles de lave dans le sous-sol, toutes reliées par des tunnels.

Il y construit des chambres, salons et ateliers, et se sert au maximum des opportunités de la nature pour laisser pénétrer naturellement la lumière du soleil.

En prolongement de ces espaces, il aménage une piscine, un coin barbecue, un salon de jardin, bref un cocon à la Barbapapa où il fait bon vivre, à l’abri des vents, de la chaleur, sans jamais s’y sentir oppressé.

Puis direction Arrieta, petit village côtier où les nuages ont décidé de s’accrocher. Le vent est frais, la pluie menace de noyer le paysage. Alors, au lieu de courir comme des poules pas de tête d’un auvent à un autre, nous nous installons au restaurant avec vue sur l’océan pour savourer un plateau de grillades de la mer.

Repus, mais avec encore assez d’énergie pour majestueusement conclure cette journée, nous reprenons la route vers l’ouest et le parc national de Timanfaya.

Nous stationnons à ce que nous pensons être l’entrée du parc, qui se révèle être le centre d’interprétation.

Le déluge qui a momentanément noyé le paysage donne à ces terres des teintes insensées.
Une des employées nous invite à vérifier s’il n’y a pas un arc-en-ciel dans le coin et, comme de fait, un magnifique pont irisé scintille dans le ciel.

N’attendant que cet instant pour sortir de son bureau, elle se met à danser sous les dernières gouttes en chantant Somewhere Over the Rainbow, un pur moment de bonheur et de rigolade.

Elle prend quand même le temps de nous informer que la barrière du parc tombe à 15h30 et que nous devrions nous magner un peu si nous voulons profiter de la visite.

Il est 15h15 lorsque nous nous affranchissons des 20 euros par visiteur pour franchir le poste de contrôle du parc.
La route s’étend comme un long serpent au travers d’un champ de lave noire et grimpe au sommet de l’Islote de Hilario, où nous stationnons la voiture.

Un guide nous informe que le bus de la visite partira bientôt. Je suis surpris, car je m’attendais à pouvoir faire quelques balades à pied, mais force est de constater que le parc est beaucoup trop grand et que rien n’est aménagé. Par contre, ayant payé 20 balles chacun, je lui demande s’il faut vendre un rein ou un morceau de foie pour monter dans le bus.
Mais non, ignorant que je suis, la balade en bus est comprise dans le prix.

Confortablement installés, nous attendons le chauffeur. Mais le guide revient et s’excuse de nous faire descendre, car il n’y a pas de visite privée avec juste deux touristes…
En attendant, nous pouvons assister aux démonstrations pyrotechniques données par quelques joyeux employés.

On nous fait former un cercle autour d’un petit cratère, et, à l’aide d’une fourche, un monsieur enfourne un ballot de buissons secs dans le trou.

Aussitôt, le branchage sec se met à fumer et, quelques secondes plus tard, prend feu. Dis donc, il y a encore pas mal d’activité là-dessous !
À chacun, il verse une poignée de pouzzolane dans la main. Ces petits graviers sont très chauds et le restent assez longtemps. Évidemment, André, pétrophile convaincu, en remplit immédiatement sa poche.

Pour terminer en beauté, on nous installe en demi-cercle, autour de buses enchâssées dans le sol. Mais quelle diablerie vont-ils encore nous inventer ?

Le pyromane en chef nous explique que le sous-sol est encore bouillonnant et qu’en y versant un peu d’eau, il va, en quelques secondes, se mettre à bouillir et à jaillir comme un geyser.


Bon, effectivement, il verse l’eau et, hop, une éructation terrestre transforme le liquide en jet céleste. Un petit prout de sous-sol, pas de quoi casser trois pattes à un canard.

Attendeeeez !
Il change de trou et y verse le reste de son seau bien rempli.
Là, par contre, on vient de chatouiller les entrailles de notre planète, et le jet grimpe haut dans le ciel en arrosant copieusement les touristes émerveillés.

Allez, il est l’heure de grimper dans le bus et c’est pas vrai que tout ce beau monde qui vient d’arriver va passer devant nous. Tassez-vous, on arrive !

Le bus emprunte une route étroite et se faufile dans un paysage dantesque.

Sur plus de 5 000 hectares s’étale un champ de lave où rien ne survit, si ce n’est un peu de lichen et quelques rares plantes incapables de produire des fruits en raison de la chaleur et de la sécheresse.

Le 1er septembre 1730, à 21 heures, une énorme explosion rugit. La terre s’ouvre littéralement, une montagne s’élève, poussée par des forces extrêmes. Le feu qui s’en échappe brûlera pendant 19 jours.

Soudain, un nouveau cataclysme, et la lave torrentielle se jette sur Timanfaya et les villages alentours. Rapide comme un torrent, elle finit par s’épaissir et coule plus lentement. Mais, encore une fois, ça ne se passe tout à fait comme espéré.
Une nouvelle explosion, des tonnes de roches en fusion foncent vers le ciel et finissent par retomber comme des bombes. La lave change de trajectoire, détruisant deux villages dans la vallée.
Toujours plus puissante, l’éruption recouvre le village de Mazo et poursuit sa route vers l’océan. Enfin, tout se calme et on commence à panser les plaies.

Mais à la mi-octobre, trois nouvelles breches se forment : ça explose dans tous les sens, scories, fumées, poussières, nuage pyroclastique, tonnerre et explosions forcent les derniers habitants à fuir en catastrophe.

On estime aujourd’hui que le volume de lave a atteint plus de 1 000 millions de m³ et a totalement transformé la topographie originelle de l’île, en en recouvrant plus d’un tiers.

Il y aura d’autres éruptions dans les années 1820 avec l’émergence de trois nouveaux volcans. Cet épisode ne dure que 3 mois et, depuis le 25 octobre 1824, l’activité volcanique est mise sur pause.

Dans le bus, l’heure est aux Ho et aux Ha, la contemplation de ces paysages hallucinants des premiers jours de notre planète nous laisse pantois.

Après un peu plus d’une heure de visite, nous retournons à notre point de départ.
Ah tiens, le restaurant sis sur cette montagne de feu est également une œuvre du prolifique Manrique.
Sa spécialité ? Cuire tous les aliments sur une grille posée sur un puits d’où sort une chaleur de démon.

Libérés des contraintes des visites organisées, nous explorons une partie de la route des vins, admirons les vignobles dans leurs abris ingénieux et dégustons quelques crus locaux.

Des Français se moquent : « Rolala, dis donc, lui, il guérit d’un ulcère ou alors il se fait un trou dans l’estomac, hein ! hihihi »
Mon Dieu, que vous êtes drôles ! Surveille donc ton gamin mal élevé qui court partout en hurlant comme un démon, espèce de patate.

La journée se termine par le spectacle toujours magique du coucher du soleil derrière les volcans.

Et pour conclure, un sourire échangé avec la jeune fille à la caisse du « dep’ », qui commence à bien nous connaître.

Encore une belle journée sur l’arrière-grand-maman des Canaries, même si elle a décidé de nous offrir une météo capricieuse comme la vieille dame qu’elle est.

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Jeudi 23 janvier – Petite rando, salines et vinophilie

Réveil au son de la pluie tombant à travers un magnifique rayon de soleil levant. Je me demande où sont ces satanés nuages qui déversent leur trop-plein alors que nous baignons dans les rayons ardents de notre étoile…

Ce matin, tranquillement, nous nous dirigeons vers le nord et ses rouleaux prisés par des surfeurs intrépides. Mais des grains plus ou moins violents, et plus ou moins imprévisibles, écourtent notre observation de la faune locale.

Un croissant et un café plus tard, nous entrons dans le centre d'interprétation du parc de Timanfaya. L'accès est gratuit et permet de comprendre le fonctionnement des volcans et la création de l'archipel.

L'archipel des Canaries est le résultat d'éruptions volcaniques sous-marines, toutes issues du même point chaud de la croûte terrestre. La plaque africaine se déplace d'ouest en est vers le continent du même nom. Pendant ce temps, sous terre, le magma n'en peut plus de toute cette pression et éructe sa lave en fusion vers la plaque africaine, finissant par la percer en créant un volcan.

Il y a environ 20 millions d'années surgissent donc les premiers volcans et, par conséquent, la première île : Lanzarote, suivie de Fuerteventura. Au fil du temps, la plaque africaine continue d'avancer, et de temps en temps, le point chaud reprend du service, faisant émerger tout un tas de volcans jusqu'à créer les sept îles de l'archipel.

La Palma et El Hierro sortent de terre il y a environ 2 millions d'années et sont les bébés îles. Pas encore érodées par les éléments, elles sont donc toutes en monts et vallées, contrairement à leurs lointaines aïeules, Lanzarote et Fuerteventura.

Ah, le point chaud n'a pas bougé ; il est donc fort probable que de nouvelles îles surgissent un jour ou l'autre, mais je doute que nous soyons encore là pour assister à cet heureux avènement.

Nous attendons que le nuage noir s'éclaircisse un peu avant de reprendre la route et de dégainer nos bâtons de marche pour une petite randonnée de mise en jambes. Quel bonheur de marcher sur ces petits graviers, un vrai tapis confortable qui contraste avec la violence du paysage alentour.

Partout, des champs de lave pétrifiée, des amoncellements de roches acérées, des bombes volcaniques, du magma éventré : l'île a connu des jours troublés.

Nous faisons le tour de la Caldera Colorada en un peu moins d'une heure, le temps pour André de comprendre comment placer ses mains dans les dragonnes de ses bâtons.

Nous filons ensuite vers le Charco Verde, un petit lac supposément verdâtre, mais qui, aujourd'hui, est transparent et reflète admirablement les nuages pommelés posés dans un ciel tourmenté. De furieux rouleaux viennent s'écraser sur le sable noir de la plage ; quelques surfeurs attendent leur vague et les touristes, que lesdites vagues emportent sur leur dos les équilibristes.

Prochain arrêt : les salines de Janubio. Construites à partir de 1895, elles sont à leur apogée vers 1945 et produisent pas moins de 10 000 tonnes de sel sur une surface de 440 000 mètres carrés. Aujourd'hui, seuls 20 % sont encore exploités, ce qui explique peut-être le prix du pot de fleur de sel de 200 g à 9 euros (14,50 ailleurs !). Mais la vue est belle et noble est le travail du saunier.

En prévision de mon activité sportive de demain, je fais une petite reconnaissance et nous déambulons dans les rues de Playa Blanca, la station balnéaire du grand sud. Un copié-collé de n'importe quelle station balnéaire, n'importe où dans le monde. 

Mêmes boutiques, mêmes chaînes de cafés, de restos, de pubs irlandais, de touristes… Vite, sortons d'ici et allons nous installer au pied du phare de Pechiguera pour y casser la croûte en admirant le déluge s'abattre sur Fuerteventura, notre voisine.

Dis donc, ne serait-il pas l'heure de quelques dégustations de vins locaux ? Et puis, la route du retour vers notre chez-nous passe exactement à travers des vignobles pour le moins originaux.

Étalés sur environ 2 000 hectares, les vignobles datent du XVIIIe siècle, après que les cultures traditionnelles eurent été détruites par l'explosion des volcans de Timanfaya.

Chaque vigne a son petit nid d'amour (hoyo), gentiment protégé des vents par un soco, un muret en pierre. Contrairement à nos observations des derniers jours, il ne pleut presque jamais sur Lanzarote (entre 100 et 200 mm par an), surtout à l'intérieur des terres où poussent ces vignes. Les terres sont arides, ne retiennent pas l'eau et le vent y est souvent très fort, pas de quoi donner le sourire à n'importe quelle culture.

Mais heureusement, il y a le picón

Le picón, c'est le petit gravier volcanique poreux qui a l'heureuse particularité de capter et de stocker l'humidité et de limiter l'évaporation. Amplement ce qu'il faut à un plant de vigne pour survivre et produire quelques grappes de raisin. Il recouvre un sol extrêmement fertile sur une épaisseur allant de quelques centimètres à trois mètres. La profondeur et le diamètre du hoyo sont déterminés en fonction de l'épaisseur de picón.

Ailleurs, dans certaines régions de l'île où l'épaisseur est moindre, on voit des vignes plantées tout en longueur, protégées par un muret rectiligne, ce qui permet une mécanisation de la récolte.

C'est également en raison de conditions météorologiques extrêmes que les plants ne sont pas palissés et poussent très près du sol. Les vendanges commencent début juillet et sont presque exclusivement faites à la main.


Il y a environ 20 bodegas qui produisent du vin, et la plupart achètent également la production de petits vignobles familiaux. Certaines vignes ont 200 ans et sont des survivantes du phylloxéra, qui a détruit la quasi-totalité des vignes en Europe au XIXe siècle. Le cépage roi est la malvasia volcánica, autochtone de Lanzarote, résistant à la sécheresse, au vent et aux fortes températures.

Notre bodega préférée, sur les cinq visitées, est El Grifo, fondée en 1775. Service impeccable, bâtisse magnifique, petit jardin de cactus, mais surtout une très belle sélection de vins, dont un blanc vieilli en fûts de bois qui a convaincu nos papilles. Enfin, surtout celles d'André, les miennes étant dysfonctionnelles depuis neuf jours.

Toute dégustation se paie, et le vin, en raison des contraintes de toute sorte, est relativement cher.

Quelques verres plus tard, je profite d'une accalmie du vent pour survoler la région, et sur le chemin des écoliers que nous empruntons pour rentrer à la casa, d'autres images s'ajouteront à la collection.

Au loin, dans l'horizon rougeoyant, des parapentistes profitent des derniers rayons du soleil couchant. Doucement, la nuit tombe sur Lanzarote. Lentement, nous rentrons nous reposer d'une journée riche en paysages et en verres de malvasia.


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Vendredi 24 janvier – Musée sous-marin et lac d’émeraude

Réveil aux aurores pour un départ au soleil levant. 
Ce matin, rendez-vous à Playa Blanca, au Dive College Lanzarote, pour une plongée sur un site original. Je laisse quelques piécettes à André et lui accorde sa matinée pour faire des folies. 

La combinaison de 7 mm enfilée, nous assistons au briefing de Steve. Puis, équipés de pied en cap, nous marchons jusqu'à une petite plage. De là, nous barbotons jusqu'au Zodiac qui nous emmènera sur le site.

Nous sommes six plongeurs, accompagnés du guide. Je suis en binôme avec Hugh, « comme Grant », me précise-t-il. Ayant détesté Quatre mariages et un enterrement et donc l'acteur, je lui rétorque : « Non, comme Jackman, plutôt. »

Les humours français et anglais sont définitivement incompatibles. Mais, malgré ses origines, il fera un bon binôme de plongée. 

Nous arrivons les premiers sur le site. Malheureusement, les fortes pluies de la veille ont drainé pas mal d'impuretés en suspension, et la visibilité est moyenne. Cela ne nous empêche pas de profiter et d'admirer les statues posées sur le sable. 

Nous explorons le Museo Atlántico et évoluons autour de douze œuvres de l'artiste Jason deCaires Taylor. Créé en 2016, le musée regroupe douze œuvres et se visite via un circuit défini.

Crédit photo : Jason deCaires Taylor

Nous débutons par les Jolateros, de petites barques pilotées par des enfants, une tradition lanzarotienne où les enfants construisent leur propre embarcation, généralement en métal, pour faire la course à l'aide de leurs mains ou de morceaux de bois pour avancer.

L'Immortal est aussi une représentation d'un rite traditionnel. Dans les anciens temps, pour honorer les morts, on ne les enterrait pas. La terre dure et quasi impossible à creuser ne permettait pas la construction de cimetières. À marée basse, les habitants édifiaient des bûchers sur la plage et y déposaient le corps du défunt. On y mettait le feu, et la marée haute dispersait les cendres sur l'océan nourricier.

Le Radeau de Lampedusa
puise son origine dans Le Radeau de la Méduse, le tableau de Géricault. Un bateau gonflable, surchargé de corps, symbolise la crise migratoire qui vient d'intéresser les médias (nous sommes en 2016). 
Il évoque aussi le lourd silence des autorités face à l'immigration clandestine massive qui se joue sur l'île, distante de seulement 90 kilomètres des côtes marocaines. Mais l'océan se fiche de la distance et, régulièrement, des cadavres sont sortis de l'eau. 
Personne ne donne de chiffres, mais l'estimation est de plusieurs dizaines de milliers de migrants illégaux et de milliers de disparus par an.

Déconnecté
est un couple en train de faire un selfie. Seule sculpture d'humains sans visage car elle représente l'ensemble de l'humanité dans son égocentricité la plus totale. La sculpture fait dos au radeau, une image forte d'une société totalement plongée dans ses écrans, insensible et égoïste.

La Traversée du Rubicon est impressionnante par sa taille. Trente-cinq personnes, adultes et enfants, le nez sur leur téléphone ou baissant les yeux vers le sol, s'apprêtent à franchir le portail d'un long mur grillagé de 30 mètres de long par 4 de haut. Le Rubicon fait évidemment référence au fleuve romain qu'aucun homme armé n'avait le droit de franchir. Jules César passa outre cette interdiction en lançant son fameux Alea jacta est. 

Le sort en est jeté et toute personne qui franchira ce mur ne pourra jamais revenir en arrière. Ce point de non-retour fait référence au bouleversement climatique et à toutes les autres décisions insensées que l'humain va prendre tout en étant conscient de leurs conséquences funestes et irréversibles. De l'autre côté de la grille, deux hommes regardent à travers les barreaux en s'y accrochant. Trop tard, le seuil est franchi.

Le Jardin hybride regroupe des formes à moitié humaines et à moitié plantes, entrelacement des humains et de la nature, indissociables pour une vie harmonieuse.

Crédit photo : Jason deCaires Taylor
Le Portail
offre l'image du plus grand prédateur de l'océan. Un autel massif est surmonté d'une grande plaque en métal inoxydable reflétant la personne qui la regarde. Les algues et les concrétions en ont recouvert la plus grande partie, mais le message est clair : on est LE problème.

Déréglementé
est comme une aire de jeux pour les enfants, sauf que ce sont des adultes qui y jouent. Les hommes d'affaires en costume et cravate se balancent sur une bascule, mais qui est en fait une pompe à pétrole ; un autre s'éclate sur une balançoire et, de loin, leur boss les regarde avec dépit. 

Sa cravate est une corde qui symbolise l'étranglement de sa vie de tous les jours avec les enfants à nourrir et à élever, les traites de la maison et tout ce qui fait de lui un esclave de la société de consommation qu'il a lui-même contribué à créer.

Crédit photo : Jason deCaires Taylor

Pour terminer, nous passons au-dessus et autour de la Gira Humano, la rotation humaine, où plus de 200 corps sont superposés, entassés dans un cercle funèbre. Cette sculpture funeste représente notre fragilité face à l'océan, qui est l'un des principaux régulateurs de la vie sur Terre.

Beaucoup de sculptures ont le visage d'une personne de l'île, ce qui contribue à personnaliser encore plus les œuvres.

Ce musée a plusieurs fonctions : créer un récif en offrant un habitat pour la vie sous-marine sur un site sablonneux où rien n'attire la faune, et susciter une réflexion sur notre condition d'humains et l'impact de nos activités sur l'environnement.

Jason deCaires Taylor
L'artiste anglais Jason deCaires Taylor pose ses premières sculptures sous-marines à la Grenade, où il vit, en 2006. Pour ce faire, il vend sa maison pour financer le projet. 
En 2009, il crée le premier vrai musée sous-marin à Isla Mujeres, au large de Cancún, au Mexique. Aux Bahamas, en 2011 et 2014, d'autres statues sont immergées. En 2015, c'est Londres qui voit arriver l'œuvre La marée montante, des cavaliers sur des chevaux reliés au sol par une pompe à pétrole en guise de tête, et en 2016, c'est au tour de Lanzarote d'accueillir le Museo Atlántico.

Il continue à déposer ses œuvres en Indonésie (Gili Meno à Bali), aux Maldives, en Norvège, à Londres, en Australie, à Cannes en France, à Chypre, à la Grenade, et sa dernière en 2024 encore à la Grenade. Plus de 1 200 œuvres ont ainsi été créées et déposées soit au fond de la mer, de rivières, sur des plages ou le long de fleuves. Un artiste engagé et talentueux.

La plongée durera 51 minutes, et avec une eau à 18 degrés, même les plus endurcis finiront par frissonner. Retour au soleil et au club, où je retrouve André, tout fier de sa nouvelle casquette, de nouvelles chaussettes, et plus une seule piécette dans les poches.

Plus ou moins réchauffés, nous remontons plein nord jusqu'au petit village d'El Golfo où nous trouvons une table juste avant le rush à la Casa Rafa Restaurante de Mar. Service au top, petits piments doux frits à la fleur de sel, filet de mérou et calamars grillés en bord de mer.

Après la visite du village et la course effrénée d'une poule devant l'infatigable André, nous montons au point de vue pour admirer ce très joli endroit.

Tiens, un chemin vers un site que des touristes semblent vouloir visiter. Et, oh surprise, au bout de ce sentier, posé entre désert et océan, coincé entre la falaise et une plage de sable noir, une étendue émeraude, le lac vert, le fameux Charco Verde (ou Charco de los Clicos) existe bel et bien ! 

Cette lagune, d'un vert intense en raison des algues qui s'y plaisent à se reproduire dans une eau à haute teneur en soufre, mesure 100 mètres de longueur et est une aire protégée dans le parc naturel des volcans.

Retour par les terres, vers Teguise, toujours émerveillés par ce paysage tourmenté. Détour et honneur au pain de la boulangerie "Levain" suivis d'une soirée calme en compagnie d'un petit flacon de Rioja.

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Samedi 25 janvier – Sortie à la capitale, rando au coeur d'un volcan et vol au-dessus du soleil couchant 

Dernier jour sur cette île si atypique.

Ce matin, nous quittons notre paisible campagne pour plonger dans l’animation relative de la capitale, Arrecife.

Cette grande bourgade, marquée surtout par sa zone industrielle, reste plutôt tranquille. Sans les horribles bateaux de croisière déversant leurs hordes de touristes en chaussettes-sandales, le front de mer pourrait même se targuer d’être agréable.

Nous commençons par nous perdre un peu dans les ruelles calmes et joliment arborées avant d’arriver sur la Plaza de las Palmas, où se trouve le marché. 

De marché, il n’y a que quelques producteurs qui vendent directement leurs fruits et légumes. Les produits sont évidemment tous locaux et de belle qualité. Des fruits aux formes étranges ornent quelques étals et, au coin, un vénérable propose des jus frais. André se laisse tenter par le jus vert composé de chou kale et d’autres bizarreries. 
C’était prévisible dès l’annonce des ingrédients : ce n’est pas bon. Mais c’est sain et détox…

Nous quittons les fiers et courageux cultivateurs et gagnons le bord de l’océan.
Au bout d'un pont, un petit fort semble surveiller les allées et venues des goélands et des vagues.
Nous arrivons au pied de la muraille du Castillo de San Gabriel, flanquée de ses canons depuis longtemps muets.

Bâti au XVIe siècle pour repousser les attaques des pirates, il est posé sur un îlot au large du front de mer, accessible par le Puente de las Bolas, du XVIIIe siècle, ou un pont plus récent, construit sous Franco. Aujourd’hui, il héberge le Museo de Historia de Arrecife.

Sur la promenade du front de mer, quelques sculptures décorent l'horizon.La plus remarquable est celle de César Manrique, assis sur un banc et regardant le Castillo de San Gabriel.

Un peu plus loin, ce sont deux danseurs drôlement accoutrés qui attirent le regard. Coiffés de masques, armés d'espèces de grosses massues, on les croirait belliqueux si ce n’était pour leurs pompons pendants aux chaussettes et leurs habits festifs.

Ces deux personnages représentent des participants aux célébrations connues sous le nom de "Los Buches", qui trouvent leurs origines dans les traditions des pêcheurs de Lanzarote au XIXe siècle. 

À l'époque, ces marins se réunissaient pendant le carnaval pour défiler dans les rues en jouant de la musique et en portant des vessies de poisson séchées et gonflées, appelées "buches". 

Avec ces accessoires insolites, ils frappaient gentiment les passants, ajoutant une touche festive et ludique aux célébrations.Aujourd’hui, cette tradition est perpétuée par des groupes locaux et fait partie intégrante du patrimoine culturel de Lanzarote.

Après une paella sur le port, nous errons encore quelque temps dans les rues et ruelles de la bourgade avant de récupérer la voiture. Mais avant de partir, une halte s’impose dans la micro-brasserie NAO, qui offre un choix de bières tout à fait honorable et un service aux petits oignons.

Armés de nos bouteilles et canettes, nous quittons la ville en direction de la Casa Museo del Campesino, une autre création de César Manrique, qui rend hommage au dur labeur des paysans de l’île. Et bonus non négligeable : l’entrée est gratuite !

Ce site met à l'honneur les agriculteurs de l'île qui, malgré des conditions difficiles, ont façonné le paysage unique de Lanzarote. Le musée offre un aperçu des traditions agricoles, artisanales et architecturales de l'île. 

On y découvre des expositions sur des métiers traditionnels tels que la cordonnerie, le tissage, la poterie et la viticulture, ainsi que des outils agricoles et la reconstitution de l'intérieur d'une maison traditionnelle. Un restaurant permet de déguster la cuisine typique des Canaries, préparée avec des produits locaux.

Pour clôturer la journée en beauté, nous enfilons nos gougounes de rando, attrapons nos bâtons de pèlerin et partons à l’assaut d’un petit volcan. Une petite randonnée très facile de 1h45 qui fait tout le tour du cône et offre, en prime, la possibilité d’entrer au cœur du cratère.

La Caldera de los Cuervos
a un seul cratère, situé dans la zone centrale de sa structure volcanique. Malgré la simplicité de ses formes, à l’époque de l’éruption, il contenait une énorme flaque de laves à l’intérieur. Même maintenant, sur les parois internes du cratère, on peut voir quelques marques qui indiquent les différents niveaux atteints par ce lac de lave temporaire, fluctuant en hauteur en fonction de la quantité de matériau volcanique que le cratère était capable d’émettre.

La rupture d’une des pentes entourant le cratère a donné lieu à l’expulsion soudaine de cette énorme quantité de lave qui s’est déversée sur la plaine, entraînant avec lui l’énorme bloc de roches qui avait précédemment entouré le cratère.

Les couleurs des terres, des sables, des roches volcaniques, vont du jaune au rouge en passant par des noirs intenses. Quelques lichens s’accrochent avec toute la force de leur résilience multi-millénaire et attendent patiemment les prochaines ondées, ajoutant quelques teintes verdâtres au paysage lunaire.

La balade est vraiment sympa, l’accès est facile si on évite le canyon du parking où notre voiture a failli rester plantée. Marcher sur ce revêtement de sable noir est un enchantement, un peu gâché par une pollution omniprésente.

Hé, vous, les fumeurs, ça ne vous tenterait pas de vous abstenir le temps d’une balade ? 
Et au pire, de vous équiper d’un cendrier de poche ? Parce que, au mieux, l’odeur de votre clope est vraiment nauséabonde et incongrue, et en plus, vous semez vos mégots partout sur le sentier, c’est vraiment du gros foutage de gueule !

Quelques chiffres bien dégueux :
Un mégot de cigarette n'est pas constitué de coton, mais d’acétate de cellulose, une matière plastique obtenue par modification chimique de la cellulose.
Chaque mégot jeté pollue entre 500 à 1000 litres d’eau et nécessite environ 15 ans pour se dégrader, et ce, uniquement grâce aux UV, car ils ne sont pas biodégradables, mais photo-dégradables.
Chaque année, sur notre belle planète, ce sont près de 4 300 milliards de mégots de cigarettes qui sont jetés dans les rues, soit l’équivalent de 137 000 mégots par seconde.


Pour terminer cette magnifique journée, je suis allé m’égarer dans un désert derrière notre casa pimpante où j'ai pris le temps d’admirer et croquer le coucher de soleil.

Demain, cap à l’ouest pour découvrir de nouveaux horizons.

                                                                                        


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