Andalousie 2024 - Cordoue - 1/3

Lundi 11 mars – Cordoue – Mezquita

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Cette matinée à Séville commence de la meilleure des façons devant des croissants hallucinants à la boulangerie de Domi Velez, élu meilleur boulanger du monde en 2021.

Nous sommes entrés tout à fait par hasard dans la petite boutique, attirés par les magnifiques viennoiseries qui trônaient crânement dans le présentoir. 
Le croissant tigré rouge est royalement farci façon gâteau au fromage, mais en meilleur, et le vert se voit garni de crème de pistache.
Nous ne pouvons passer à côté d'un pain au chocolat - oui oui, même les Espagnols l'appellent comme ça - au bidon diablement bien rebondi. 

Un petit coup de Bolt et nous voici en gare de Santa Justa où le train à grande vitesse partira avec un peu de retard, mais rien ne presse.

Quarante minutes plus tard, nous débarquons à Cordoue et après 15 minutes de marche nous arrivons à la Hospedería Alma Andalusi où nous sommes très agréablement accueillis.

Le temps de déposer nos sacs dans la petite chambre et nous partons à la découverte de cette ville. 

J'ai rapidement trouvé le nouveau slogan pour l'office du tourisme : 
Cordoue c'est trop chou, Cordòba c'est sympa. 
Franchement, ça se peut pas une ville aussi mimi ! 

Le site est occupé dès la préhistoire, mais les peintures rupestres ne sont pas vraiment claires à ce sujet. Hormis que ça avait l'air d'être une sacrée fiesta, Caramba !

Les Romains fondent officiellement la ville de Corduba environ 200 ans avant la naissance du p’tit Christ. 
Idéalement située au bord du Guadalquivir, elle devient la capitale de la province d’Hispanie ultérieure puis celle de la province de la Bétique. 

Pour la petite histoire mignonne, Sénèque l’Ancien y a vu le jour ainsi que son fils le célèbre Sénèque tout court. 

On peut encore voir nombres de vestiges de l’époque romaine en sa baladant en ville. On niaisait pas avec la job dans le temps pour que temples, ponts, arènes et autres Arcs de Triomphe soient toujours debout et en fier état.

Les Romains, trop sûr d’eux se font ramasser par les Vandales, suivis des Wisigoths, à qui la ville appartient jusqu’en 711, quand les Musulmans en prennent le contrôle et en font le centre administratif et politique du royaume d’Al-Andalus

Nous y reviendrons dans le bilan qui promet moult batailles épiques et rebondissements inattendus. Revenons à notre découverte de cette charmante bourgade avec son centre historique à tomber en pâmoison. 

Chaque coin de rue, de ruelle, d'impasse ou de placette réserve une nouvelle surprise. Les murs blancs, les volets bleus, les briques rouges, les majestueuses portes en bois, et, au travers de grilles, la vision sur des patios fleuris, tout est adorable. 

Nous allégeant de 2 euros, nous franchissons la petite porte de San Bartolomé, une chapelle funéraire construite aux alentours des années 1400. Majestueusement décorée de céramiques, elle rayonne de l'art mudéjar. 

Assis sur un morceau d'Histoire, dos à l’enceinte de la Mezquita, face au bar Santos, nous piochons allègrement dans une assiette généreusement remplie d'une tranche de tortilla. 

Nous descendons vers les rives du Guadalquivir, de l’arabe ouadi al-kebir - grand fleuve -, dont les eaux tumultueuses ont viré au brun suite aux fortes pluies des derniers jours. 

Les ruines d'un vieux moulin à eau abritent des dizaines de chats provisoirement isolés sur leur petite île. 

Traversant le fleuve aux eaux tourmentées sur le vénérable pont romain sur lequel passait la Via Augusta, une route qui partait des Pyrénées  - donc de Rome - et rejoignait Cadix, nous faisons demi-tour au pied de l'imposante Torre Calahorra.

Pendant 2000 ans, le pont romain - ou Pont Vieux - est le seul qui permet de franchir le fleuve sans se mouiller les babouches. En 1953, on décide enfin de poser le pont de Saint Raphaël au sud de son vieux frère suivis en 2003, 2004 et 2011 par trois autres constructions.
Il était temps !

De retour coté Cordoue, nous allons nous perdre dans le dédale des ruelles avant d'aller visiter la Mezquita, la mosquée-cathédrale de Cordoue, de son petit nom officiel : cathédrale Notre-Dame de l'Assomption. 



Contrairement à beaucoup de monuments bâtis sur d’anciennes mosquées, ici, la cathédrale a été construite à l’intérieur.

Fondée au VIIIe siècle à partir d’une église wisigothe datant du VIe siècle elle-même érigée sur un temple romain, les styles s'y mélangent, se superposent, se subliment. 

En 785, la mosquée d'origine voit le jour, et deux plus tard sa construction est terminée. Sa forme est un ‘’presque’’ carré et sa surface atteint 5 800 m2.

Dans les années 830, premiers agrandissements qui se poursuivent les décennies suivantes en raison de la croissance démographique de la ville. 

La troisième et dernière extension a lieu vers 987 pour atteindre sa taille définitive. 
La mosquée voit sa surface atteindre 23 400 m2, faisant d’elle la deuxième plus grande du monde après celle de la Mecque et sera supplantée seulement en 1588 avec la construction de la Mosquée Bleue d’Istanbul. 

Sur les 1293 colonnes d’origine supportant des doubles arches blanches et rouges, il en reste 856, ce qui suffit amplement à l’émerveillement. Les rayons du soleil jouent avec les ombres de cette forêt de colonnes, les bruits sont feutrés, le respect de l'immense beauté est de mise. 

Le mihrab, une niche dans le mur (qibla) est une œuvre d’art à part entière. 

Celle-ci, contrairement à la tradition, ne désigne pas la Kaaba à la Mecque vers laquelle les croyants doivent se tourner pour la prière, mais s’orienterait vers la Grande Mosquée de Damas créée au début du VIIIe siècle par le lointain ancêtre du fondateur de l’émirat de Cordoue Abd al-Rahman Ier, le calife omeyyade Al-Walid Ier. 
Nostalgie quand tu nous tiens ! 

Les décorations en mosaïque du mirhab et la maqsura (la salle de prière réservée aux souverains) qui la suit, sont sublimes. 

Vers 960, on demande la crème de la crème des artistes de Byzance pour s'occuper de la déco de ce mirhab.

L’empereur chrétien Nicéphore II, magnanime, envoie son meilleur mosaïste avec une petite prime de 1 600 kg de cubes d’or. 
Des tesselles qui, 1064 ans plus tard nous émerveillent toujours autant et on ne peut que rester de longues minutes à écarquiller les yeux pour tenter de s’imprégner de tant de beauté. 

En 1236, la ville repasse sous le giron chrétien et la mosquée est rebaptisée cathédrale. On n’y change pas grand-chose sinon l’ajout de chapelles le long des murs. 

Au 16e siècle, Charles Quint autorise la destruction du centre de la mosquée pour y construire la Capilla Mayor, la grande chapelle.

Devant le résultat catastrophique des travaux, le roi, en beau maudit, aurait dit : « Vous avez construit ce que vous ou n'importe qui d'autre auriez pu construire n'importe où ; pour ce faire, vous avez détruit quelque chose d'unique au monde."
Il est fort probable que quelques coups de fouets ont été distribués suite à ce commentaire.

Il faudra pas moins de 250 ans pour en terminer la construction où divers styles architecturaux se télescopent.

Comme nous n’avons pas vu comment c’était avant, cette Chapelle Majeure nous écrase de sa superbe. Dorures, retable, bois massifs, sculptures et statues nous toisent de leurs siècles d'existence. Avant de quitter les lieux, nous refaisons le tour de cet incroyable édifice où le temps s’est complètement arrêté.

Si la religion est souvent source de troubles en raison de la bétise crasse de certains mous du bulbe, il faut reconnaître que les monuments construits en son nom sont quand même vachement classes ! 

Nous sortons en plein soleil, traversons le patio de los naranjos et nous dirigeons vers la Juderia - l'ancien quartier juif -, un entrelacs de ruelles où il fait bon se perdre. 

Passages étroits, couloirs ouverts sur des patios aux carreaux colorés, portes massives en bois, pots de fleurs accrochés aux murs chaulés, marbres, mosaïques, colonnes, arches, fontaines et palmiers.

Cette vieille ville au charme intemporel est un bonheur à parcourir lentement, pavés inégaux oblige.

Nous retraversons le fleuve sur le Pont de Miraflores et longeons le parc jusqu'au pont romain et les ruines d'un ancien moulin.

Verre de tinto verano, olives cassées, c'est l'heure de l'apéro.

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En soirée, nous repassons par la cour des orangers de la Mezquita où le soleil couchant jette ses ors puis nous sortons de la vieille ville pour les quartiers plus frétillants de la ville neuve.
 
Grande place animée, magasins illuminés, fontaine aux reflets bleus, il est 21 heures, à peine l’heure de l’apéro pour les locaux, mais largement l’heure du souper pour nous. 

La journée se termine devant une assiette de jambon, évidemment, et de quelques lampées de Rioja.

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CLIC - CLAC, merci Cricri !

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