Asie 2019 - Philippines - Bohol

4 février – Bohol - Chocolate hills
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L’aube est encore jeune lorsque carillonnent les trompettes de la Grande Marche Triomphale.

Mister Charles conduit une Honda et, dans les rues encore calmes de Cebu nous emporte vers le Pier 3 où nous attend notre ferry. Il est 6 h 12, le soleil se lève, les enfants, enfin ceux qui le peuvent, se pressent vers leurs écoles. 
Normalement, la scolarité est obligatoire et gratuite pour tous les enfants de 6 à 16 ans, mais je doute fortement que les gamins que nous avons vus ces derniers jours n’aient jamais posés leurs fesses sur un banc usé par des années d’utilisation.
De toute façon, qui se soucie d’eux dans ce maelstrom citadin où chacun essaye de s’en sortir.

Nous montrons nos billets aux gardes solidement armés et avons à peine le temps d’admirer l’architecture et la décoration des lieux que déjà on nous appelle pour monter dans un bus.
Celui-ci fera la tour du hangar pour nous déposer devant le pont-levis du ferry qui était juste à côté.

Classe touriste, grande cabine climatisée, sièges confortables et peu de monde, nous avons la place de nous étendre. Un petit garçon de moins en moins timide me regarde avec curiosité.

Tout à coup, on entend une prière dont le texte défile sur une grande télévision. André tout à déguster ses brioches se demande ce qu’il se passe, mais reste imperturbable et concentré sur son petit-déjeuner. Pendant ce temps, la voix en appelle à la Sainte Vierge de nous protéger pendant cette navigation, André froisse son papier et hausse les sourcils en se demandant toujours qu’est ce qui est en train de se passer…

Après deux heures sur une mer tranquille, nous accostons à Tubigon et sommes tout de suite interpellés par des chauffeurs de tricycles qui demandent 800 pesos pour nous emmener à Carmen. Non, mais ça va la tête, 800 pesos ? Non merci monsieur je vais aller voir à la gare routière s’il n’y a pas un bus. Comment ça la gare est trop loin et il faut monter dans votre véhicule ? J’ai ''maps.me'' sur mon téléphone qui dit que les bus nous attendent à 300 mètres. Il rigole et me souhaite un bon voyage.

Arrivée en face du grand McDo, plusieurs bus et minivan attendant des clients. Un gars nous appelle, dit : "Carmen 50 pesos" et nos sacs sont mis en soute, bien protégés des flaques d’huile noire par un grand carton.
À 9 h 30 pétante, le pot d’échappement vomit ses gaz noirs et c’est parti pour une virée à travers les montagnes. Nous sommes, bien sûr, les seuls occidentaux dans ce bus et les gens nous regardent avec de grands sourires et de la bienveillance.

Nous nous arrêtons souvent pour débarquer ou embarquer des passagers, qui doivent payer sans discuter, le préposé aux billets n’est pas commode.

10 h 45 nous arrivons en gare routière de Carmen où, d’après ce que nous voyons, il n’y a absolument rien à faire.
Nous sollicitions les services d’un microbus qui pour 100 pesos nous emporte vers notre lodge. Impossible de se tenir correctement assis, le plafond doit être à 1 mètre de hauteur, nous nous félicitions de ne pas être montés dans un tricycle pendant plus d’une heure.

Accueillis par un monsieur un peu taciturne, on nous montre notre chambre.

Je laisse André faire le tour du propriétaire et demande à voir la piscine dont les photos sur le site vantent la présence. Non pas une, mais bien deux bassins sont mis en avant pour encenser le séjour magique en ces lieux.

Ah. En fait ils ont transformé leurs piscines de rêve en bassins de phycoculture… L’eau verte où plus rien ne se passe n’est pas vraiment une invitation à prendre un cocktail sur une chaise longue. Cet endroit a sûrement déjà été très en vogue, mais depuis les années 80, rien ne semble s’être passé.

Retour à la chambre, où André essaye de passer indemne à travers plusieurs émotions.
Le lit est recouvert d’un matelas fin, mais finalement relativement confortable, le balai a été passé, et nous avons droit à un savon.
Les peintures tombent en lambeaux, les toilettes se révéleront être bouchées, dommage que je ne l’ai pas su avant, et les hamacs du jardin sont recouverts de fourmis.

Nous prenons rapidement une soupe et demandons à louer un scooter. Le monsieur nous les offre à 600, je lui demande un prix pour 3 jours, il baisse à 500.
Son fils, Jeff, qui gère les réservations arrive et me propose de choisir un des deux véhicules poussiéreux mis à disposition. S’ensuit l’essai des casques et André arrivera à rentrer une moitié de tête dans le plus grand.

Nous partons en direction de Carmen pour faire le plein. La pétrolette semi-automatique est facile à conduire, mais ne tient pas la route. On dirait une mob pour enfant !

Demi-tour et direction l’attraction de la place : les Chocolate Hills.
Plus de 1200 collines toutes arrondies et de hauteur quasi identiques peuplent la région. C’est un phénomène très rare que beaucoup de touristes viennent voir et que le pays aimerait classer au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Comme sur tous les sites plus ou moins touristiques du pays, une obole est demandée à l’entrée. De jeunes filles tentent de nous vendre de l’eau ou des bananes, mais nous avons déjà tout ce qu’il nous faut.

Un stationnement grouillant accueille les deux-roues, les voitures ne peuvent pas rester plus de 15 minutes. Ensuite, il faut gravir les escaliers qui mènent au sommet du point de vue à 360º d’où l’on embrasse un paysage magnifique.

En cette fin de saison humide, les fameuses collines devraient être rebaptisées ‘’Tea Matcha Hills’’, car la végétation est encore très verte. Pour profiter pleinement de leur appellation officielle, il faut venir en pleine saison sèche, lorsque toutes les herbes ont pris la couleur brune du chocolat.

Ce sera pour une autre fois.
De retour à notre scooter et sans aucune envie de retourner dans notre galetas, nous prenons la route du Sud en direction d’une cascade. On ne lâche pas le morceau, on n’y peut rien. Dès qu’on voit le pictogramme ou l’inscription ''waterfalls'', c’est plus fort que nous.

La route à travers les rizières est magnifique. C’est sûr que nous aimerions voir des plages et de l’eau turquoise, mais pour l’instant ce sont des fagots jaunis et prêts pour la récolte qui enjolivent le paysage.
Partout sont plantés de petits drapeaux qui enlèvent tout doute quant aux substances utilisées pour ces récoltes. Inutile de chercher du riz biologique ici…

Nous bifurquons à droite en direction des Panga Waterfalls et suivons un chemin de terre un peu défoncé pendant 4 kilomètres.
Trente pesos plus tard, nous pouvons admirer les chutes qui s’écoulent tranquillement dans un petit bassin qui invite à la baignade.
Évidemment, nous avons laissé maillots et serviettes dans nos sacs, mais qu’à cela ne tienne, je vais laver mon short de sport qui en a grand besoin.

L’eau est agréablement fraîche et les cascades revigorantes. Je ne tomberais pas sur les rochers glissants, et André en profitera pour rester sur la berge à regarder faire mes âneries.

Entre temps, nous avons décidé d’écourter d’une nuit notre séjour à Carmen et tentons de garder le moral. Déjà 4 jours aux Philippines et rien ne se passe vraiment comme prévu. Bon, c’est un voyage et l’imprévu fait partie du quotidien, mais là on aimerait que ça décoince…

J’essaye de sécher mon short en roulant tout en faisant des checks aux enfants sur le bord du chemin. Aussitôt qu’ils voient un Occidental, les petits courent sur le bord de la route et tendent la main pour qu’on puisse les toucher. C’est très drôle de voir tous ces marmots se retourner comme un seul homme pour apercevoir qui arrive et crier byebye en tendant leurs bras. Ils sont adorables de gentillesse et de sourires, la mauvaise graine du tourisme de masse n’a pas encore poussé par ici.

Nous poussons la mob jusqu’à un petit supermarché pour acheter une grosse bière et du rhum local. On hésite à prendre celui qui contient 80 % d’alcool, pour finalement choisir celui à 55, qui se révèle très doux et assez agréable à boire.

Nous nous installons au soleil sur la terrasse-mirador qui surplombe les piscines en se disant que l’endroit a sûrement eu des jours de gloire. Les infrastructures sont ambitieuses, des cascades en béton devaient faire couler une eau fraîche et filtrée dans les bassins et la grande salle de restaurant pleine de touristes. Tout ce qu’il reste sont des eaux de pluie stagnantes et des tas de chats qui cuisent au soleil.

Il est 19 heures lorsque nous allons nous installer dans la salle à manger et que la jeune file nous explique que la cuisinière étant partie, il n’y a pas de quoi nous nourrir.
C’est la boule de glace sur le halo-halo !

Nous décidons à cet instant que nous quitterons les lieux dès demain matin. Le bonhomme tente de déboucher les chiottes, mais c’est trop tard, de toute façon il n’y a rien à faire. Je me demande bien ce qui m’a pris de réserver trois nuits ici !

Jeff vient rapidement, alerté par les coups de téléphone des demoiselles, je lui explique gentiment pourquoi nous partons et il comprend notre décision.
Les chambres déjà payées en ligne, j’avais prévu de tirer un trait dessus, mais il propose de ne pas me faire payer le scooter, de nous offrir également les repas de midi, le petit-déjeuner du lendemain et de nous rembourser une nuit. Je trouve ça très gentil de sa part et le remercie.

Puisqu’il n’y a rien à manger ici, nous partons vers Carmen dans l’espoir de trouver quelque chose, ne serait-ce que quelques biscuits Soda. Finalement nous achetons un poulet entier sur grill de bord de route et ferons le bonheur des locaux auxquels nous disons qu’il est succulent.
Mince, ils ont oublié d’ajouter la tête avec le corps du volatile.

Nous dégusterons la volaille dans la salle de restaurant de notre lodge, cherchons frénétiquement une piaule pour demain matin et tentons de garder le moral.

On va bien finir par voir la mer !


5 février – Bohol - Tagbilaran

Tiens, la cuisinière est revenue !
La carte peu alléchante comporte quand même des œufs pour faire une omelette. Et puis nous nous poserons sur le bord de la route pour arrêter le prochain bus en direction de Tagbilaran où nous avons finalement trouvé une chambre pour deux nuits.

L’attente ne dure guère plus de 8 minutes, un bus jaune est en vue, je lui fais un signe, un garçon saute et embarque nos sacs à dos dans la soute. Nous grimpons rapidement et allons tout au fond sur les banquettes libres, tout en écrasant quelques pieds et en assommant du monde au passage de nos petits sacs. Les tailles des installations sont faites pour les locaux, pas pour des Occidentaux généreusement nourris !

En moins d'une heure et demie et pour à peine 70 pesos, nous arrivons en gare de Tagbilaran. Nous montons dans un tricycle qui est déjà très étroit pour deux voyageurs sans bagages et nous rendons rapidement à notre hôtel.
Par chance la chambre est déjà prête, nous pouvons nous installer sans attendre l’heure officielle du check-in de 13 heures.

Armés de nos chaussures de voyage, nous partons immédiatement au port réserver nos billets de bateau pour l’île de Siquijor où nous voulons débarquer dimanche.
Rendez-vous est pris à 10 h 20 dimanche matin pour une traversée de deux heures.

Nous remontons vers le centre et marchons sans trop avoir de but, sinon celui de nous sustenter.
Tout à fait par hasard, nous tombons sur une succursale de la Bohol Bee Farm, une toute petite parcelle de culture de légumes bios, devenue une entreprise très florissante et un modèle depuis sa création il y a une quinzaine d’années. Du premier jardin de ses origines, la ferme est devenue lodge de luxe, restaurant et magasins de souvenirs.
On y trouve tout un tas de produits dérivés, comme du beurre de mangue, du café de maïs et évidemment du miel. Ses restaurants sont beaux, bons et le service impeccable, nous mangerons comme des rois.

Je me laisse tenter par la proposition du serveur de goûter au halo-halo. Un dessert composé de salade fruits recouvert de glace pilée, et de deux boules de crème glacée. Le mien contient des filaments de noix de coco et de gingembre, c’est délicieux !

Nous reprenons la route, visitons la cathédrale au plafond superbement peint et au Jésus au regard halluciné qui porte sa croix en équilibre sur l’épaule, ou de Lui-Même enfant aux drôles de proportions… Ne nous moquons pas, nous avons déjà eu assez de déboires comme ça.

Deux chauves-souris se poursuivent en poussant des petits cris sous la coupole. Des hirondelles ont élu domicile sous les solives des bas-côtés et viennent frénétiquement donner la becquée à leurs gourmands poussins.

Le centre commercial en vogue est sans intérêt, nous poursuivons nos déambulations jusqu’à notre chambre où nous allons nous abriter de la chaleur étouffante de cette fin d’après-midi.
Le scooter pour demain est réservé, la voiture pour après-demain également, il reste à organiser le reste du voyage.

Il y a quelques années, voyager avec un sac à dos était simple. On arrivait quelque part, simplement armé de notre Lonely Planet, Routard ou Rough Guide et on allait frapper aux portes des logements répertoriés. S’il y avait de la place, on visitait les chambres et on choisissait d’y rester ou pas. Négociation rapide du prix, contact humain sans intermédiaire, la simplicité efficace et aventureuse.

Internet est arrivé, nous avons eu accès à des millions d’informations pour étoffer le voyage et échanger de nos expériences, jusque-là tout allait encore bien.
Et puis sont arrivés les sites de réservation en ligne, en même temps que les nouveaux touristes, Russes, Chinois, et autres qui n’avaient pas encore eu la chance de parcourir le monde. Forts de leur nouveau pouvoir d’achat et la puissance de leur masse touristique, ils ont envahi les lieux jusque-là tranquilles.
Il est devenu quasi impossible de voyager sans réserver, surtout pour des endroits où l’offre d’hébergement est limitée. Les nouveaux riches ont fait grimper les prix, et de nombreuses résidences de luxe inaccessibles aux voyageurs classiques ont vu le jour.

Sans compter de la gêne occasionnée par ces nouveaux touristes qui ne connaissent pas les règles et à vrai dire s’en foutent complètement.

Voilà où on en est. Des recherches à n’en plus finir, sur des sites de réservation, jongler avec le budget, faire des concessions et ne plus vraiment avoir le bonheur d’être totalement libre de ses dates. Si on veut être certain d’avoir une piaule relativement bon marché quelque part, il faut réserver une à deux semaines d’avance. Et faire un trait sur l’improvisation du parcours.

On a donc réservé notre billet d’avion et de bateau et tant pis si on se sent vraiment bien quelque part. Le problème est d’autant plus criant aux Philippines, archipel de plus de 7 300 îles qui ne se visite pas aussi facilement qu’un autre pays.
Mais nous allons faire avec et profiter de ce que nous allons rencontrer. C’est peut-être juste un voyage test…

Ce soir, c’est Jollibee au bout de la rue ou tricycle vers le Bee Farm… Nous laissons 50 pesos au chauffeur et allons nous installer sur les petits bancs du 7-Eleven en face du resto.

Il est un peu trop tôt pour aller manger, alors, armés de notre litre de San Miguel Pilsen et de deux coupes à glace en carton, nous prenons l’apéro devant la vitrine du dépanneur.
C’est assez original quand même, et c’est le gardien de sécurité qui s’occupe de nettoyer les tables après le passage des consommateurs.

À 2,25$ le litron de broue, ça fait un apéro plutôt économique, vive les dépanneurs philippins !


6 février – Bohol - Visite des tarsiers, et fantastique chute aux chutes

À 1 h 25 le bar karaoké sous notre chambre avait fermé ses micros. Plus personne ne s’égosillait en tentant d’imiter les chanteurs à succès des années 80.
Tout le monde sait que le karaoké est l’une de mes activités préférées avec le magasinage et la dégustation de soupe au foie de porc.
De toute façon, grâce aux bouchons enfoncés entre le marteau et l’enclume, nous étions sourds aux vagissements des clients trop motivés.

Alors, ce matin, guillerets et convaincus que cette journée serait enfin la bonne, nous partîmes avec entrain récupérer le scooter réservé la veille.
Le jeune homme arrive à l’heure, mais il n’a pas de monnaie à rendre sur 1 000 pesos. Lui, le malin il vient louer son scooter à 500 balles et n’a pas le change sur 1000.
Je l'embarque sur la selle et descends à la station-service, faire le plein, récupère la monnaie pour le payer et, à sa demande, le dépose devant sa boutique à 23 mètres 50 de là.
Puis je récupère mon vrai passager et nous partons rapidement en direction de la première activité de la journée, l’observation des tarsiers.

Kosséça un tarsier ? Pour ceux qui ne savent pas comment utiliser Gogole, voici un bref résumé.
Le tarsier, de la famille des Tarsiidae, est un minuscule primate de 15 cm de long.
Il a des yeux tellement gros qu’ils ne peuvent pas bouger dans l’orbite. Il se sert donc de sa tête qui pivote sur 180º pour voir ce qui se passe autour de lui.
Aussi vif qu’un ado en pleine puberté, il ne bouge pas de son arbre sinon pour se nourrir la nuit. Là, il retrouve un peu d'énergie et peut faire des bonds de 5 mètres pour attraper ses proies, principalement des insectes. Il varie son menu avec des oiseaux, des œufs et des serpents. Vu la grosseur du bestiau, j’imagine que sont exclus de son régime les anacondas et autres pythons royaux.
Après 6 mois de grossesse, la femelle met bas à un seul bébé par année, si les touristes chinois lui en laissent la chance.

Sa tête est aussi grosse que son corps, un seul de ses yeux fait la taille de son cerveau et les deux brillent la nuit ( les deux yeux, pas l'oeil et le cerveau !) ce qui fait très peur aux peuples indigènes de Bornéo qui le prennent pour un ''hantou" (un démon. Sérieux, des peuples qui chassent le sanglier sauvage avec des pics à brochette en bois et qui ont peur d'un tout minus).

Autre fait cocasse, il peut communiquer par ultrasons avec ses potes, ce qui le rend invisible aux oreilles de ses proies et prédateurs.

Malheureusement, cette jolie petite bestiole est du genre ultra-stressée. Le moindre flash de Kodak, la plus petite contrariété et hop, il arrête de respirer comme Pépé, le fils de Soupalognon y Crouton, mais lui va jusqu’au bout est en meure.
Mis en cage, il se fracasse la tête contre les barreaux et se fend le crâne, ce n’est pas ce qu’on appelle une ouverture d’esprit, mais bel et bien un suicide.

Je vous laisse donc imaginer comment se sentent les quelques spécimens du parcours d’observations lorsqu’un groupe sinoexcités débarque.
Les gardes ont beau leur intimer de faire la file comme tout le monde, les inviter à rester sur les sentiers balisés ou à ne pas dépasser les barrières en bambous, ils s’en tapent comme de leur premier bol de riz.

Muni de mon défunt zoom (ça vient plus tard), je peux prendre quelques clichés de l’animal sans le déranger. Mais la plupart des visiteurs sont équipés de leurs téléphones, voire de l’ostie de selfie-stick pour s’approcher au plus près du pauvre petit bouchon coincé sur sa branche.

Ça me dépite de voir de tels manques de discernement alors que partout des affiches invitent les visiteurs à garder le silence, respecter les distances et bâillonner les enfants qui devraient rester enfermés dans la voiture.

Nous reprenons la route à la recherche de quelque chose à grignoter. Par chance dans le village suivant, l’une de ces fameuses petites boulangeries nous offre 6 viennoiseries pour 075$ et l’une des miennes est délicieusement fourrée de noix de coco râpée et sucrée.

Ensuite nous cherchons une cascade. Faut-il être totalement dérangé pour continuer à courir après des chutes d’eau ? Nous tournons, virons en suivant les instructions du GPS qui en perd le Nord. Les routes ont toutes changé, des tas de travaux sont en cours et j’ai peur que l’application se supprime d’elle-même de mon téléphone.



Un gros nuage noir vient se vider le cœur, mais un généreux samaritain nous propose de venir le rejoindre sous le toit de son atelier de fabrique de parpaings.


Tourne la bétonneuse, enfouis la pelle dans l’amalgame caillouteux et remplis un moule qu’il met en marche dans un vacarme assourdissant. En quelques secondes, de grosses briques sont prêtes à partir au séchage.
Il a arrêté de pleuvoir, nous remercions l’ouvrier et reprenons la route.
Après 4 demi-tours, nous abandonnons l’idée de trouver la Kasawan waterfall et roulons en direction d’une valeur plus sûre, car mentionnée dans le Lonely Planet.

Une route en pleine construction nous mène à la grotte d’Inambacan.
Une dame sort de son cagibi et vient récolter les 10 pesos pour le nettoyage des lieux. Je ne les récupérerais pas lors,que je lui ramènerais les déchets ramassés sur la berge.
Une nouvelle averse nous incite à chercher un abri. Finalement les chutes d’eau ne sont pas toujours là où on les attend…

D’une petite grotte impossible à visiter sort un puissant ru qui vient alimenter la rivière. Cinq rochers où l’eau s’écoule bruyamment l’autorise à se nommer cascade. Pas de quoi casser trois pattes au canard blanc qui se baigne en aval, mais le soleil donne de belles couleurs à l’ensemble du paysage.

Allez, on se dirige vers une autre cascade, la plus grande et impressionnante de l’île, dixit LP.
Mag-Asso waterfall n’est qu’à 10 minutes de scooter avec un accès bien protégé par un long bambou que manie habilement un enfant au goitre impressionnant. Sa maman nous demande 15 pesos pour faire passer notre engin et, arrivés au sommet de l’escalier qui mène au cours d’eau, un autre gardien nous demande 20 pesos par personne pour pouvoir emprunter les marches.

La cascade est jolie, on peut se baigner dans le bassin et je m’amuse à prendre quelques photos avant de voir de plus près à quoi ça ressemble. Il n’y a qu’un autre couple sur les lieux, c’est très beau, calme et reposant.

Je n’ai pas vu que le sommet du rocher était recouvert d’une fine couche d’argile. À peine le temps de souffler un caliiiiiisse bien senti, que je me retrouvais cul par-dessus tête, appareil photo contre caillou. Évidemment, je me suis fait très mal, mais le plus grave c’est que j’ai quelque peu niqué mon objectif en le cognant contre le traître monolithe glissant.

J’ai beau essayer de le décoincer, il est définitivement hors d’usage. Les prochaines photos ne seront peut-être pas aussi travaillées, et ça fait un poids mort à traîner.
Tsé quand la chance a décidé de te tourner le dos pendant quelques secondes…

Je suis toujours en vie, ma main droite est presque guérie, et ma hanche en titane devrait se parer d’un superbe hématome d’ici un ou deux jours. J’ai bien hâte de voir quelles couleurs vont défiler sur ma peau de pêche.

En parlant de pêche, puisque je suis déjà à moitié mouillé autant y aller complètement. Je lance mon t-shirt, mon appareil photo et ce qu’il me reste de dignité à un André très inquiet, puis me jette dans le grand bain.

Depuis le tremblement de terre de 2013 (magnitude 7,2), qui a radicalement transformé le paysage, la cascade a perdu de sa superbe.
Mag-Asso, dans le dialecte des habitants de Bohol signifie ‘’fumée’’ ou ‘’grande fumée’’.La chute fut ainsi baptisée, car elle boucanait plus qu’un vapoteur en manque de nicotine. Le tremblement de terre est passé par là, la configuration a changé et la cascade n’est plus qu’un fort torrent qui tombe d’une hauteur trop peu impressionnante pour créer un magasso digne de ce nom.
Au moins, l’eau est fraîche, ça change le mal de place.

Nous profitons de l’endroit qui depuis le départ du couple russe nous est entièrement réservé. Baignade dans les petits bassins, relaxation, planche sur le dos à regarder les feuilles tomber, tout va bien.

Nous gravissons les marches en direction de notre petit véhicule bien plus sécuritaire que la zézette de Carmen et nous en retournons à la ville pour y manger un morceau.

La suite de la journée sera faite de confirmation de location, de réservations diverses et de projet de trajet. Bien sûr, tout cela est sujet à changements.

Nous prendrons place sur un banc du 7-Eleven pour y écluser deux litrons de San Miguel et achetons des sacs de pinotes aux deux jeunes frères qui traînent leurs paniers de pop-corn et d’arachides.

Une succursale de Bucket Shrimps a ouvert en juillet 2018, et nous ne nous ferons pas prier pour aller y déguster quelques moules au curry et d’excellentes crevettes au beurre cajun.
Un vrai délice à manger avec les doigts et sans classe.
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