Samedi 4 février – du Lago Rupanco au Lago Ranco, où les cailloux flottent

La nuit a été d'une quiétude totale. Nous prenons tranquillement notre petit-déjeuner, allons nous baigner dans le lac et en profitons pour nous laver. 

Un gros martin-pêcheur domine les eaux calmes du haut d'un arbrisseau. Vif comme l'éclair, il plonge, saisi son repas et se repositionne au sommet de son observatoire. Nullement gêné par la présence humaine, il nous regarde quelques secondes avant de fondre sur un autre alevin imprudent.


Nous remettons un peu d'ordre dans notre cahute et prenons la route vers le nord. J'ai branché le petit transformateur acheté à Valdivia sur l'allume-cigare pour donner un peu de jus à mon ordinateur. Les secousses insensées que subit la pauvre carriole font tressauter mon transformateur jusqu'à ce qu'une odeur de plastique brûlé nous alerte. 

Plus de radio, plus d'allume-cigares, plus moyen de charger nos téléphones et donc mon GPS. J'imagine que c'est un fusible qui a cramé, mais pour l'instant, je n'ai pas envie d'investiguer.

Au bout d'une heure, enfin le chemin de terre redevient route et les suspensions prennent un peu de repos. Nous aussi.

Nous arrivons dans le petit bourg d'Entrelagos et tombons totalement par hasard sur un resto/café qui n'attend que nous. Toute l'équipe est en cuisine en train de préparer des dizaines de küchen plus beaux les uns que les autres. Nous ne pouvons pas résister à la gourmandise et ferons de ces portions notre repas de midi.

Le fameux küchen
Le küchen, est mon plaisir gourmand dans cette région du Chili. Les nombreux immigrés allemands ont amené dans leurs besaces moult recettes de leur pays. Bières, plats, desserts, viennoiseries, etc. Ce gâteau, qui est plutôt une tarte, est préparé avec un appareil qui ressemble à une crème pâtissière, et des fruits de saison. 

Et en ce moment, c'est le festival du petit fruit : framboises, bleuets, pommes, murta, mûres, il y a l'embarras du choix. Il est quelquefois recouvert de streusel, ce mélange à base de beurre, farine et sucre qui entre dans la composition de quelques pâtisseries d'origine germaniques.

Rassasiés, nous poursuivons la route et, en nous aidant de l'application iOverlander, nous nous dirigeons vers le lac Ranco et surtout vers une petite péninsule qui est chaudement recommandée. 

Une route de gravier passe devant un camping où des dizaines de tentes sont entassées les unes sur les autres. Qu'ont donc en tête les campeurs qui quittent leurs villes surpeuplées pour venir tous se retrouver au même endroit ? Il y a tellement d'endroits déserts dans ce pays que je n'arrive vraiment pas à comprendre ce besoin de se rassembler alors qu'on est censé s'isoler un peu.

Peu après nous arrivons au-dessus d'une baie où il n'y a absolument personne. 
Notre petite Maradonette se fraye un passage au milieu d'une plage de sable en formation et nous allons inspecter les lieux. 
Comme d'habitude, c'est mieux un peu plus loin. Nous remontons donc dans notre véhicule et allons jusqu'au bout de la piste. Et là, une plage juste pour nous dans une baie juste pour nous avec un endroit pour faire un feu de camp juste pour nous !

Au bout de la baie, une avancée rocheuse gorgée de chaleur descend doucement dans les eaux du lac. J'en profite pour tester mon deuxième leurre, mais au bout de 45 minutes de lancés infructueux, je me résigne et range mon attirail d'apprenti pêcheur. Nous mangerons du risotto aux asperges ce soir. Avec du vin.

Par contre, la baignade sera fort agréable, finalement les eaux des lacs de montagne chiliens ne sont pas si froides que ça. 

Je suis complètement éberlué par ce qui flotte autour de moi.
Au boulot !
Des milliers de petites billes blanches se collent sur les rives, restent coincés dans les rochers et viennent alimenter le sable de la plage. En y regardant de plus près, je me rends compte que ce sont des cailloux. Tout autour de nous de la pierre ponce de toutes les tailles. Je ne me lasse pas de soulever de très gros cailloux avec deux doigts et de les lancer dans le lac dans lequel ils vont flotter.

Personne ne viendra perturber la sérénité des lieux jusqu'à 22 heures où une petite voiture semble s'être perdue. Voyant le feu digne du Burning Man une soirée de la Saint-Jean que je viens de ravitailler, les nouveaux arrivants font demi-tour et s'installent de l'autre côté du petit boisé qui nous cache mutuellement.

Le croissant de lune pâlit à peine un ciel rempli d'étoiles. C'est incroyable de voir tous ces astres au-dessus de nos têtes, de se plonger dans la Voie Lactée que frôle une Croix du Sud magnifique. 

La vue d'un ciel infini ponctué d'étoiles est un spectacle dont je ne me lasse pas. Il me rappelle à chaque fois ce bonheur que nous avons tous perdu en vivant dans des villes trop éclairées qui nous privent d'un plaisir simple et pourtant si compliqué à assouvir.
La nuit ne sera pas plus agitée que les rides venant troubler l'onde cristalline du lac.

Ah, j'ai changé le fusible que j'ai mis sur un mauvais circuit. Le moteur ne voulait plus démarrer et le son creux du démarreur à un bref instant créé un léger mouvement de panique chez mon passager. Finalement, j'ai trouvé le fusible de rechange, que j'ai branché sur le bon circuit. Le moteur démarre et nous avons de nouveau la radio. 
Pour l'instant.

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