Mercredi 19 février – Tangalle – Mirissa. Rendez-moi mon argent !

Dernier repas au Roti Hut. 
Il est 8h30, le cuisinier n'est pas encore arrivé. L'amoureux de Fanny ne se peut plus de sourire et se trompe dans la commande. Il faut dire qu'à part le patron et le Chef qui parlent anglais, personne n'est vraiment capable de prendre une commande. 
Nous finirons par tous avoir nos plats, mais ce matin a été laborieux. Danny nous dit qu'hier soir il y avait 8 tortues sur la plage. Avant d'être déçus, nous demandons aux Français derrière nous. En fait, il y avait 8 tortues en tout sur une grande plage durant toute la nuit. Eux en ont vu une seule... 
Quel marchand de rêves ce Danny ! 

Nous récupérons nos sacs et nous rendons à la gare routière. Un bus est en partance pour Mirissa où nous avons décidé de passer trois jours. La plage est parait-il plus peuplée que Tangalle (difficile de faire moins), on aimerait y prendre un cours de cuisine et aller voir les baleines le lendemain. La baignade y est également plus facile, car les vagues y sont moins fortes. 
En attendant, nous jetons nos sacs, qui commencent à pâtir de ce traitement, dans la soute et montons dans le bus. L'avantage de monter à la gare, c'est qu'il reste presque toujours des places assises et aujourd'hui ces places vaudront de l'or. Le bus (100 Rp) va jusqu'à Galle et passe donc par Mirissa. Avec le recul, nous aurions aimé avoir un changement à Matara, mais nous n'en savions rien. 
Le bus est parti en trombe, et ne s'est jamais calmé pendant toute la durée du trajet. Ce bus est piloté par un aliéné. Le conducteur a forcé la dose sur le crack ce matin. Les virages sont pris sur deux roues. Le klaxon semble fonctionner sans arrêt. Les gens sautent et montent en marche, c'est la première fois que j'ai l'impression que nous allons faire la Une des journaux du soir. 
Le calvaire va durer deux heures et nous sortons enfin, trempés et tremblants de ce cercueil roulant. C'est officiel, je préfère le train, même avec des toilettes bouchées et des poussins gavés de H5N1. 

Nous sommes sur la route principale, ne sachant pas trop où aller alors que la chaleur est intense et que nos nerfs sont en pelote. Nous visitons quelques établissements de bord de mer, mais les prix demandés sont vraiment trop élevés. Si encore c'était propre et bien rangé, mais même pas. Sans sourire, on nous demande 5000 Rp pour une piaule qui n'en vaut pas 1500, le bord de mer est en demande... 
Las, nous traversons la route et montons une rue secondaire qui s'enfonce dans les terres. Un touriste nous croise et nous averti que le bruit sur la plage le soir est infernal et que nous ferions mieux de choisir un logement plus loin dans les terres, de plus le prix sera bien moindre que dans les taudis bétonnés et trop chauds. Excellente information, nous le remercions et poursuivons nos recherches. 
De toute façon nous ne pouvions trouver l'équivalent de ce que nous avions à Tangalle et puis ce ne sont pas cinq minutes de marche qui vont nous décourager. Après deux ou trois visites infructueuses, nous tombons sur une bâtisse d'allure neuve. Un vieux monsieur y tient une clinique ayurvédique et loue quatre chambres à l'étage. Elles sont propres, neuves, presque pas sales et le prix reste abordable pour l'endroit (3000 Rp) alors que nous avons vu des horreurs à 5000 Rp. Il fait trop chaud, nous devons nous poser avant de perdre définitivement le contrôle de notre patience. Presque en face de notre logis se trouve la guesthouse Amarasinghe qui donne des cours de cuisine pour 2500 Rp. Nous réservons la session du lendemain matin et nous rendons à la plage. 

Les touristes sont là, rangés bien comme il faut sur leurs chaises longues, enduits d'huile de coco. Les bimbos trop serrées dans leurs micro-maillots pour le plus grand plaisir des Srilankais, les douchebags-carotte, musclés du torse qui ont oubliés de travailler leurs jambes dans la salle de gym, les fêtards à peine réveillés de leur beuverie nocturne, et nous. Les décalés... 
Nous n'avons pas un maillot de bain différent chaque jour, n'avons pas pensé à passer les dernières semaines avant notre départ dans une cabine de bronzage et avons laissé notre ghetto blaster dans les années 90. 
Mais les prix des restos sont raisonnables, la nourriture y est bonne et la plage est vraiment très belle. Seule une petite partie de cette plage est occupée par des transats alignés comme à la parade. Le reste est tout à nous. 

L'eau est chaude, les vagues se posent avec un peu moins de brutalité qu'à Tangalle, et nous pouvons marcher plus loin et nous sentir plus en sécurité. Nous nous doutons qu'aux alentours se cachent quelques bijoux de plages désertes, nous profiterons des prochains jours pour aller en explorer une ou deux. 

Mirissa est réputé pour être un lieu d'observation du plus grand animal que la planète a jamais porté : la baleine bleue. Avec de la chance, on peut aussi y voir des cachalots, baleines à bosses et dauphins, entre autres. Nous réservons notre sortie pour le surlendemain matin. Un transfert est offert de notre guesthouse jusqu'au port d'où part le bateau. Sur les conseils d'Alex (et du LP), même absent il gère encore, nous choisissons Raja and the whales. S'il est plus cher (6000 Rp) que les autres agences dont les prix varient entre 2500 et 4000 Rp, il est reconnu pour être un des plus respectueux. La plupart des ''bonnes affaires'' ne se contentent pas de montrer les animaux de loin sans les déranger, mais foncent dessus pour offrir à leurs clients des sensations qui disparaîtront si ce cirque continue. 
Depuis la nuit des temps, au large de Mirissa les baleines viennent batifoler. Ce serait dommage que quelques opportunistes viennent y mettre fin. Mais comme ce sont les touristes qui font la loi, c'est à eux de changer. Mais les nombreux touristes Russes croisés ces derniers jours ne sont pas prêts à cet effort. 

Mirissa
Ces considérations écotouristiques faites, il est temps de profiter de ce que Mirissa a de meilleur, sa plage. Nous y croisons une dernière fois le couple d'Allemands et leur jolie petite fille, blonde évidemment, que nous avions rencontré dans le wagon à bestiaux. Eux aussi sont un peu déçus de leur visite ici, et regrettent amèrement leur choix de chambre sur la plage. Ils repartent demain pour Tangalle. 
Les vagues s'étalent de toute leur longueur sur le sable fin. La pente est douce, le danger est moindre et le plaisir de se laisser surprendre par un rouleau d'écume est intact, quasi enfantin. 

Mais une préoccupation plus matérielle me domine. Une épée de Damoclès balance au-dessus de mon porte-monnaie. Je n'ai pas assez d'argent pour payer nos activités et je viens d'apprendre que ce bled, relativement touristique, ne possède pas de guichet automatique. Je dois me rendre à Welligama pour retirer quelques billets. 
Avant que l'après-midi ne soit trop avancée, nous prenons le bus pour cette ville voisine et partons à la recherche de l'ATM providentiel. Rapidement trouvé, mais tout aussi rapidement refroidi, aucun billet ne sort de cette machine infernale. Probablement en manque de liquidités comme ça m'est arrivé à Ella, je continue mes recherches. Heureusement, plusieurs banques tiennent commerce et je vois au loin trois panneaux annonçant la fin de mon stress. Qui ne fait qu'augmenter au fur et à mesure des messages : Sorry, we cannot follow up your request. Please contact your bank. 
Je sacre comme un vieux forgeron du Bas-du-Fleuve, il fait chaud, j'ai faim et soif, et j'ai juste de quoi payer une sorcière locale pour conjurer le mauvais sort. 
 
Je laisse le temps à ces machines du Démon de se refaire une santé avec une promenade le long de la plage. Quelques gamins jouant au cricket me dérident et des pêcheurs m'offrent de magnifiques sourires de star. C'est toujours ça de pris.   

Finalement au bout du 15ème essai j'abandonne et nous attrapons un bus pour Mirissa avant qu'il ne fasse complètement nuit. Mon statut Facebook me vaut quelques propositions d'aide via un virement par Western Union, sinon il me reste toujours quelques babioles à vendre sur le bord de la route. 
Au fait, un énorme merci à qui de droit ! 

Je décide d'acheter quelques crédits sur Skype, appelle ma banque qui me confirme que ma carte est bloquée. J'avais pourtant signalé mon voyage, mais l'informatique domine les humains, bienvenue dans la Matrice. 
L'opératrice de la Caisse populaire Desjardins ne perd pas le nord et me propose de me faire changer de forfait vu que je n'utilise pas correctement celui qu'elle m'a vendu il y a 4 ans. Pour aussi peu que 6$ par mois, blablablabla... 
Est-ce que je suis réveillé ? Je suis à l'autre bout du monde, je n'ai même plus de quoi payer cette nuit qui est arrivée et la folle me vend un produit bancaire ? Je lui fais comprendre que mon problème actuel est crissement plus compliqué qu'un tabar..k de forfait de chnoutte dont je n'ai rien à foutre. 
Un peu sous le choc je reste sans voix, quand un opérateur Visa prend le relais pour me confirmer que tout est rentré dans l'ordre. Ce serait quand même vachement sympa que je puisse être prévenu en pareil cas... On verra ça à mon retour. 

Le cœur un peu plus léger nous allons manger chez Amarasinghe que Youcef nous a vanté d'être le pourvoyeur des meilleurs rotis qu'il ai jamais mangé. Même meilleurs que notre regretté Roti Hut. 
Hé bien, nous avons été déçus. Dégoulinants d'huile, presque vides de farce aux légumes et fromage, ces rotis sont très ordinaires. Est-ce quelqu'un peut appeler notre cuisinier de Tangalle ? 

Cette journée a assez duré, nous regagnons nos étuves en regrettant d'avoir réservé un cours de cuisine. Si les currys sont à la hauteur des rotis, c'est moi qui prend les commandes des fourneaux ! 

Même à plus de 500 mètres de la plage à vol d'oiseau, nous entendons les basses résonner dans l'air chaud de cette jeune nuit. Elle promet d'être longue, André menace de jeter quelques cocktails Molotov pour se défouler. Heureusement il a peur du feu. 

Demain, je dois me lever tôt pour aller à Welligama et vérifier la générosité des ATM.


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